Marie*, 80 ans et Robert*, son époux, 88 ans, sont arrivés dans la salle du pôle de Saint-Gatien-des-Bois quelques minutes avant le début des festivités. C’est la première fois qu’ils participent à ce type d’événement. Le couple vient pour « voir ». Il est inséparable. Marie s’occupe de son mari tous les jours. « Je l’aide à effectuer les gestes du quotidien comme la toilette, l’alimentation ou l’habillement. Une personne m’épaule deux fois par semaine pour la douche. » Elle est ce qu’on appelle une « aidante ».
Oser son sentiment d’épuisement
Les difficultés de Robert sont physiques. « Il peine à marcher. Ses doigts ne sont plus très souples. Il a du mal à manger. Par exemple, il faut lui couper sa viande. » Se sent-elle éreintée quelquefois par ce rôle très prenant ? Elle le concède du bout des lèvres : « Parfois je suis un peu fatiguée car les nuits sont perturbées. Il a souvent besoin de se lever. » Mais aussitôt, comme pour chasser une mauvaise pensée, elle lâche un long sourire. « Ce n’est rien », semble-t-elle laisser entendre. Entre ces deux-là perce encore une histoire d’amour.
Près de 9,3 millions aidants
Les aidants familiaux comme elle sont près de 9,3 millions en France (8,8 millions d’adultes et 0,5 million de mineurs de cinq ans ou plus) selon une enquête de la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees), menée en 2021. Ils apportent une aide régulière à un proche en situation de handicap ou de perte d’autonomie.
« Ils ont tendance à s’oublier et à passer au second plan, après le proche aidé. Les professionnels s’en rendent bien compte, d’où le choix de la thématique de la journée », signale Mylène Vallée, la coordinatrice action gérontologique du centre local d’information et de coordination (Clic) du pays d’Auge Nord, à l’origine de l’événement. Les profils d’aidants venus se documenter sont soit des conjoints ou conjointes comme Marie, soit des adultes enfants d’un parent âgé.
« Les échanges noués avec certains d’entre eux sont forts en émotion. Beaucoup nous remercient parce qu’ils sont contents d’être présents, de pouvoir parler, échanger avec d’autres aidants et avec des bénévoles, des associations ou des experts de la santé. Ce qui ressort de ces témoignages, c’est la possibilité qu’ils ont d’exprimer leur sentiment d’épuisement et de ne pas arriver à récupérer. Dans cet espace, aujourd’hui, ils s’autorisent à dire : “Ce n’est pas facile tous les jours.” »
Relaxation, échange et jeux
Tout a été prévu pour que ces anges gardiens de la vie courante puissent participer l’esprit léger aux animations. L’association locale Le Temps retrouvé, spécialisée dans l’accompagnement des personnes souffrant de troubles de la mémoire ou du comportement, est venue les relayer, s’occupant des proches aidés tout au long de l’après-midi. Entre autres ateliers concoctés pour le public aidant, la relaxation grâce au conseil d’une sophrologue, l’automassage ou la réflexologie, la cohérence cardiaque et l’olfaction, un temps de parole en compagnie d’une ergothérapeute pour apprendre à se libérer du temps pour soi. Chaque séance a duré une heure.
Aide au répit de la Mutualité sociale agricole
La MSA Côtes Normandes n’a pas manqué ce rendez-vous, venue en force montrer la palette de ses services en matière d’accompagnement des personnes âgées sur le territoire. « Je suis là en tant qu’assistante sociale, explique Servane Pouclée (en photo ci-contre), chargée des cantons du pays d’Auge Nord dont fait partie la commune de Saint-Gatien. À ce titre, j’interviens auprès des aidants, que ce soit individuellement ou collectivement. Je présente et explique les prestations d’action sociale. »
Avec sa collègue Audrey Culleron, animatrice territoriale, elles ont convié les visiteurs à un brainstorming ludique qui a permis de passer en revue les besoins en termes de repos et les solutions pour y accéder.
Ce moment récréatif a été l’occasion de libérer la parole sur les envies d’escapades, de réconforts et de rappeler l’aide au répit proposée par le régime agricole. « Nous avons aussi offert à tous les aidants un livret détente à base de coloriage qui offre du temps pour soi, souligne Audrey Culeron, qui s’occupe aussi des élus du territoire. Les mandalas aident à se mettre dans une bulle rapidement selon le temps qu’ils peuvent s’accorder. »
*Les prénoms ont été changés.
Des élus de la MSA cultivent le bien-être
« Cultivons le bien-être », c’est le message que les élus du pays d’Auge Nord de la MSA Côtes Normandes ont délivré aux aidants venus découvrir les accompagnement dont ils peuvent bénéficier dans leur territoire. Yves Munhoven, Guy Fauche (président d’échelon) et Denis Houlette (en photo ici), bénévoles élus dans le collège des salariés engagés à la Mutualité sociale agricole, contribuent dans le cadre de leur mandat au bien vivre ou bien-être des populations. Leur ancrage local leur permet de détecter très vite des besoins ou des problématiques spécifiques au monde rural et d’enclencher en guise de réponse une action de prévention, d’information ou de soutien. Ils peuvent même initier des fêtes afin de célébrer des valeurs fortes du monde agricole comme ce fut le cas lors des journées de l’alimentation, en octobre 2022. Ce rôle est une spécificité du régime agricole qui organise une élection tous les cinq ans pour les choisir. L’élection en question rassemble trois types de candidats représentatifs de la population agricole. Ils sont répartis selon trois collèges : le 1er collège réunit les exploitants, le 2e collège est celui salariés, le 3e est composé par les employeurs de main-d’œuvre. Actuellement ils sont plus de 2 500 délégués bénévoles à porter les couleurs de la MSA. Tout au long de la journée des aidants, nos bénévoles de la MSA Côtes Normandes ne se sont pas contentés de participer à l’animation proposée par l’assistante sociale Servane Pouclée et l’animatrice territoriale Audrey Culleron, ils ont également participé aux ateliers dédiés à la relaxation et aux exercices physique. De cette façon ils ont été en contact direct avec des aidants dont ils ont recueilli les difficultés.