Qui dit rentrée scolaire, dit cantine pour beaucoup d’enfants. Non loin du moulin de Cassel, célèbre dans la région, les gourmets de l’école d’Oxelaëre ne sont pas logés à la même enseigne que leurs autres camarades. Eux, mangent dans un véritable restaurant, aux côtés des clients et au beau milieu du service de la mi-journée. Une expérience unique et un cadre convivial en guise de réfectoire.

La cantine des T’chiots bradés1

La sonnerie résonne au loin, et après elle les premiers cris des enfants sortant de leur salle de classe suivent rapidement. Soudain, depuis la terrasse du restaurant « Au pied du mont« , situé à quelques pas de l’école, on aperçoit un groupe d’élèves arriver dans le calme jusqu’au pas de la porte. Il est 12h20. Les sourires sur les visages fleurissent en même temps qu’émergent les doux effluves de fromage chaud provenant de la cuisine. La joyeuse troupe passe devant le comptoir du bar. Elle salue le personnel, et file à l’étage, qui leur est entièrement réservé.

« Ce midi, c’est toasts au maroilles, risotto poulet curry légumes et brochettes de fruits frais, présente Mickaël Monvoisin, le gérant des lieux, devant une immense cheminée au sein de laquelle braisent lentement des volailles. Nous nous approvisionnons en local auprès des agriculteurs du village et ceux des alentours. » La Ferme des Templiers, La pommeraie, Au fournil des Flandres… autant de producteurs installés à Oxelaëre et fournisseurs officiels de l’estaminet.

S’asseoir au restaurant « comme les grands »

« Nous avons la chance d’avoir toutes les productions à proximité et de pouvoir les valoriser, poursuit son épouse, Odile, qui s’active en salle pour servir la cinquantaine de couverts. C’est un point d’honneur de les mettre à la carte. » Pour le plus grand plaisir des petits convives qui, une fois l’entrée terminée, n’hésitent pas à demander du rab du plat principal !

« Ils sont gâtés, même chouchoutés, sourit Aurélie Plockyn, agent territorial qui accompagne les enfants chaque midi. Chacun souffle sa bougie le jour de son anniversaire. Il y a parfois des desserts surprises et des coloriages pour patienter entre les plats. C’est vraiment une chance pour eux. »

L’estaminet, petit café populaire

Auberge ou estaminet ? Dans les Hauts-de-France, mais aussi en Belgique et au Luxembourg, c’est la même chose. L’estaminet désigne un débit de boisson ou une brasserie. On y trouve généralement des services de proximité ou des jeux traditionnels.

Dans le nord de la France, ils font partie intégrante du patrimoine culturel. Ils sont synonymes de cuisine rustique et familiale.

« On a aussi des burgers frites, de très bonnes pâtes à la carbonara et on adore le fromage blanc qu’on nous sert », listent Lilou et ses copines parmi leurs préférences. Ce qui rend fiers les gastronomes en herbe est surtout de s’asseoir au restaurant « comme les grands » mais également de participer au service. « On peut débarrasser ? » demandent d’ailleurs Thomas et Louis.

Par groupe de quatre, les élèves de CM1 et CM2 traversent l’établissement et se rendent en cuisine pour vider leurs déchets alimentaires et mettre leurs couverts à la plonge. « Ça leur apprend le partage, le tri, le recyclage, lance le chef cuisto. En plus de découvrir de nouvelles saveurs, ils gagnent en autonomie. » Et retournent en classe repus et reposés.

Une cantine qui donne de la vie au village

L’estaminet a ouvert ses portes en 2021. Il appartient à la commune d’Oxelaëre qui a entièrement entrepris la rénovation et la réhabilitation d’un bâtiment laissé à l’abandon, place de la mairie. « L’objectif est de recréer de la vie au village, surtout après la pandémie liée au Covid, avec un lieu de restauration et de rencontres, résume Damien Derhille, adjoint au maire, en charge des travaux et du personnel. Il était important pour les élus de proposer une alternative aux plats réchauffés à la vingtaine de demi-pensionnaires du regroupement pédagogique intercommunal (RPI). Et le tarif n’a pas augmenté, il est resté de trois euros par repas. »

« Lorsqu’on a repris le commerce, le but avec la municipalité était d’y intégrer la cantine scolaire, soulignent Mickaël et Odile. Nous sommes en total adéquation avec la démarche et avons carte blanche pour imaginer les plats destinés aux enfants. Nous sommes accompagnés par une diététicienne et engagés à proposer un menu végétarien par semaine. »

Aujourd’hui, le restaurant met en avant sa particularité. L’estaminet-cantine fait le plein, ouvre les week-ends et organise des soirées à thèmes pour réunir les habitants. Désormais, sept personnes y travaillent dont des jeunes en formation. Au pied du mont, les pieds sous la table et l’esprit village retrouvé.

(1) En patois Chti, se dit d’enfants qui sont gâtés, chouchoutés.

Après le troquet, la maison de santé

Suite au succès de l’estaminet, Stéphane Dieusaert, maire d’Oxelaëre et agriculteur, poursuit sur sa lancée avec des projets vecteurs d’emplois et de services. « Sur le même principe, la municipalité a racheté l’ancienne boulangerie, qui a déménagé un peu plus loin, pour en faire un salon de coiffure, explique-t-il. Cela a permis à une coiffeuse de lancer son entreprise au printemps dernier. Il faut se battre pour pérenniser nos artisans et commerçants en zone rurale ».

Dans la rue de l’église, c’est un autre projet, entamé en mars 2024, qui est sorti de terre cet été : la maison de santé pluriprofessionnelle Au cœur des Flandres. Inaugurée le 8 juillet, la structure de 700 m2 vise à lutter contre la désertification médicale. « Nous avons réussi à réunir onze professionnels (médecins, kinésithérapeutes, infirmiers, gynécologue et psychologues, ndlr). Tous les locaux sont complets », se réjouit fièrement le premier édile. La dynamique mairie d’Oxelaëre partage régulièrement des photos et vidéos de ses initiatives sur les réseaux sociaux, faisant parler d’elle dans toute la France.