Ce chaud matin de juillet, alors qu’il a travaillé toute la nuit à la fraîche pour traiter une partie de ses vignes, Rémi Dumas, viticulteur à Saint-Geniès-des-Mourgues, commune rurale de l’Hérault de 2 000 âmes, tombe nez à nez avec une famille de sangliers qui s’est invitée sur son domaine pour prendre un petit-déjeuner à ses frais, à base de grains de raisin bien juteux.

Le trentenaire au sourire communicatif, amoureux de son terroir et des traditions camarguaises, dégaine aussitôt son smartphone pour faire vivre en direct l’instant de vie agricole à ses abonnés. Il poste ces quelques mots sur Twitter : « À quelques mètres de moi, certains commencent les vendanges… On vous nourrit et on les nourrit aussi. » La machine implacable des réseaux sociaux se met aussitôt en route et le débat (caricatural) entre écolos et chasseurs s’enflamme…

Expliquer son métier

« Je ne cherche pas à polémiquer mais il est important d’expliquer notre métier au grand public parce que notre profession ne vit pas hors-sol, assure ce délégué MSA du canton Petite Camargue depuis 2020 et as des réseaux sociaux depuis qu’il a repris l’exploitation familiale en 2014, à seulement 24 ans. Quand je révèle que la présence d’herbes dans mes vignes est la conséquence de la réduction de 50 % de l’utilisation des herbicides, c’est parce que c’est ma réalité. Mes pratiques évoluent sans cesse pour apporter un produit fini qui plaise au consommateur tout en réduisant mon impact sur l’environnement et en me permettant de continuer à vivre de mon métier. »

L’Héraultais, qui cultive 40 hectares en cours de certification haute valeur environnementale (HVE), valorisés en indication géographique protégée (IGP) Pays d’Oc, fait également œuvre de pédagogie lorsqu’il prend soin d’expliquer à ses abonnés pourquoi il vendange de nuit. « Si on démarre nos tracteurs à 3 heures du matin, ce n’est pas pour embêter les gens mais pour amener des grains frais au pressoir, ce qui évitera de devoir les refroidir. En agissant ainsi, on limite non seulement notre impact écologique mais on fait aussi du meilleur vin car le raisin s’oxyde moins. »

Infatigable défenseur des agriculteurs

Membre de la chambre d’agriculture du département, Rémi Dumas occupe depuis juin dernier le poste de vice-président des JA, syndicat agricole dédié à la cause des moins de 38 ans, dont il gère la communication. L’infatigable défenseur de la cause agricole préside aussi Demain je serai paysan, une association transpartisane issue des JA, lancée au dernier Salon international de l’agriculture en réponse au défi du renouvellement des générations.

« Nous avons reçu le haut patronage de trois ministères (Agriculture, Éducation nationale et Travail), de la commission agriculture des Régions de France et de celle des Départements. Cela va nous permettre de faire la promotion de l’agriculture et des formations agricoles dans les écoles et les collèges, ainsi qu’en direction des personnes en reconversion professionnelle, intéressées par un métier qui embauche partout en France. »

Fer de lance de cette entreprise de séduction auprès des jeunes, qui passe également par les médias sociaux, la publication du journal trimestriel Le P’tit Agri à destination des écoles primaires, dont le premier numéro sort ce mois-ci. Il porte sur la pomme, les hommes et les femmes qui font vivre cette filière.

Ce qui laisse peu de temps à Rémi Dumas pour ouvrir un compte TikTok, l’application plébiscitée par les adolescents. S’il est à l’aise sur Facebook, Instagram et Twitter, il a un peu de mal avec le petit dernier qui construit son succès sur les chorégraphies en musique. « J’essaie de m’y mettre mais mon déhanché n’est pas au top », plaisante-t-il. Son truc, c’est plutôt les courses de taureaux. Cavalier passionné, en tant que gardian de manade, il contribue à préserver les traditions camarguaises au sein du club taurin de sa commune.