Et si les crèches et les maisons d’assistants maternels qui se développent dans les communes rurales étaient en réalité les bons indicateurs pour mesurer la revitalisation des territoires ? À voir le dynamisme de certaines municipa­lités qui s’attellent avec énergie à la question de l’accueil de la petite enfance, on serait tenté de le croire.

Le bonheur est dans le pré et ce n’est pas un poème en Haute-Corse : les populations optent pour cet environnement de carte postale.

« On a une population qui s’accroît d’année en année. Cela permet aux parents de disposer d’un mode de garde supplémentaire. Avant il fallait soit aller sur les communes voisines soit trouver une assistante maternelle. C’est une grande avancée. Cette action était attendue depuis de nombreuses années. »

Bruna Guidicelli, assistante sociale à la MSA de la Corse, qui a suivi à Prunelli-di-Fiumorbo le projet de la micro-crèche U primu passu, inauguré le 3 janvier

Fini les galères pour les parents contraints de se débrouiller afin de trouver une solution de garde satisfaisante, qui prenne en compte toute la gestion du quotidien. Pour certains, la logistique compliquée à imaginer les oblige à jon­gler entre les horaires de cours de la fratrie, l’éloignement des établissements où les marmots sont scolarisés et les contraintes du travail. Une vie que les maires ne veulent pas pour leurs administrés pour rien au monde, conscients qu’en milieu rural, c’est aussi un confort essentiel pour les parents. La campagne est donc favorable à la vie de famille et à l’épanouissement des enfants.

La campagne aime les famille et leurs enfants

C’est le message que Prunelli-di-Fiumorbo, en Haute-Corse, adresse fermement à ses 3 667 habitants en se dotant d’une micro-crèche capable d’accueillir une dizaine d’enfants. « Cela répond à un besoin. Beaucoup de femmes doivent renoncer à la vie professionnelle lorsqu’elles ne disposent pas de struc­ture d’accueil. Cela permet dans le même temps de socialiser l’enfant et de ne pas le laisser grandir de façon isolée. Sur le plan social, c’est l’occasion de faire des repérages car la situation de certains peut être critique », signale André Rocchi, le maire, également médecin généraliste, très investi sur la question de la santé.

Un agriculteur vous fait visiter Prunelli-di-Fiumorbo

À dessein, il a choisi les petites struc­tures. « Je ne suis pas pour des tailles supérieures pour des raisons de santé publique. La commune d’à côté dispose d’un établissement de cinquante places. J’y suis opposé. En tant que généraliste, je préfère en avoir trois de 12. Au niveau épidémiologique, c’est plus facile à gérer. Cela n’a pas un retentissement aussi important quand on ferme une crèche de 10 places qu’une de 50. Ensuite, il faut savoir que les épi­démies (gastroentérite, bronchiolite, etc.) se renforcent dans les grands nombres alors qu’on peut les amortir sur de petites séries. »

Bien-être et santé au rang des priorités

Sa commune possède un centre médical dont il est fier et qui reflète son dynamisme. « Citez‑moi une seule com­mune en ruralité profonde qui mette à disposition des patients dans un cabinet médical des échographies Doppler, un scan­ner IRM, mais aussi une gynécologue, une pédiatre et un laboratoire d’analyses médicales pour 4 000 habitants ? Cette réussite médicale attire beaucoup de monde et sécurise. »

Seule difficulté rencontrée au moment du lancement du projet, « l’absence d’une Madame ou Monsieur crèche qui s’occupe de mobiliser les énergies. On a été envoyé, regrette-t-il, d’un guichet à l’autre, d’un spécialiste à l’autre, d’un équipementier à l’autre. »  

Création d’une maison d’assistants maternels (MAM)

Guy Moulin-Paoli, le maire de Solaro, à quelques kilomètres de là, n’a pas encore créé sa crèche. Elle est en projet. Il faudra compter 3 à 4 ans pour qu’elle voie le jour. En attendant, il entend répondre à ce besoin par la création d’une maison d’assistants maternels (MAM). « Après avoir discuté avec la caisse d’allocation familiale (CAF), la protection maternelle et infantile (PMI) et les assistants maternels qui travaillent sur le territoire, il a nous semblé judicieux de créer une MAM associative, soute­nue financièrement par la commune (prise en charge du loge­ment, subvention). Ce projet pourrait voir le jour dès la fin de l’année ou début 2023. »

Inviter la population à rester sur leur territoire

Derrière cette solution d’accueil, il y a le souhait de donner à la population des raisons de rester sur le territoire en lui facilitant le quotidien. « C’est légitime de pouvoir apporter chez soi des solutions pour que les gens de notre commune ne soient pas obligés de se déplacer dans celle d’à-côté où même s’ils seront bien accueillis, ils ne seront pas prioritaires. On veut pouvoir offrir sur place ce qu’il faut pour que les gens puissent s’installer chez nous. »

Développement du commerce de proximité

Une initiative à la hauteur de la démographie en plein essor à en croire le maire, également médecin hospitalier. Le village de semi montagne est à 500 mètres d’altitude. Les 700 habitants sont un peu éparpillés dans les maisons formant des hameaux et des lotissements. «Il y a pas mal d’endroits où des gens viennent habiter parce que le cadre de vie est sympathique et agréable. » En parallèle au projet de petite enfance, il compte développer une activité commerciale « dans le respect des normes environnementales car c’est important pour nous. Tout près du lieu où on aménagera la MAM, à côté de la mairie annexe, est prévue une petite zone où vont être installés quelques commerces. »

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