Le congrès national des maires ruraux avait pour thème « Le futur s’invente au village ». Quels sont, selon vous, les atouts spécifiques des campagnes pour relever les défis de demain ?
Tout est réuni pour réussir : des élus engagés, des ressources locales comme l’eau, la forêt et la terre agricole. Si l’on ajoute l’espace dont manquent les villes, la ruralité a toutes les cartes en main. Il faut maintenant que le législateur reconnaisse ce potentiel pour encourager davantage de passage à l’action des acteurs locaux, en particulier des élus.
Qu’il s’agisse d’agriculture ou de production d’énergies renouvelables, nous avons une position unique sur le marché. Ces efforts méritent une reconnaissance accrue, tant financière que sociale, afin de valoriser pleinement le rôle stratégique des territoires ruraux.
Faut-il, selon vous, un grand plan pour la ruralité, à l’image des politiques de la ville, pour redonner du dynamisme à nos villages ?
Nous avons remporté de petites victoires. La création du premier Plan ruralité en 2019, ajusté en 2023, ainsi que la mise en place du programme Villages d’avenir, montrent une réelle prise de conscience : il faut changer de modèle pour un aménagement plus équilibré du territoire. Ce changement reste lent, mais il ouvre la voie à une ambition plus grande et à une véritable équité.
Notre objectif principal est d’augmenter les dotations de l’État, car produire du service public à la campagne coûte plus cher. La voie est ouverte, mais il appartient maintenant à tous les acteurs ruraux de se fédérer et de mobiliser l’État à leurs côtés.
Les campagnes sont confrontées à de graves situations de désert médical. Quelles solutions proposez-vous pour attirer et fidéliser les professionnels de santé ?
Je serai sans doute plus radical que certains de mes collègues. La mauvaise répartition de l’offre de soins découle de politiques centrées sur l’hôpital, au détriment de la médecine de ville. Le prix payé par la ruralité est trop élevé.
L’AMRF appelle donc à une responsabilité collective : toute nouvelle installation d’un professionnel de santé devrait s’accompagner d’au moins une journée par semaine dans une maison de santé située en zone sous-dotée.
Le renouvellement passe aussi par l’arrivée de nouveaux habitants. Comment favoriser la cohabitation entre anciens et néo-ruraux ?
Le maire joue un rôle essentiel de médiateur, de fédérateur, d’« accélérateur de particules ». Il doit avoir les moyens d’exercer pleinement ces missions. C’est pourquoi nous revendiquons la création d’un véritable statut de l’élu avant les prochaines municipales. Avec son équipe, le maire favorise la rencontre, l’échange et la construction collective.
L’arrivée de nouveaux habitants représente une chance : un regard extérieur révèle souvent des potentiels que les acteurs locaux n’avaient pas identifiés. Dans un avenir où les réfugiés climatiques des villes seront plus nombreux, la question de l’hospitalité sera essentielle, et le maire en est déjà un artisan du quotidien.
En tant qu’acteur clé du monde rural, quels leviers la MSA peut-elle mobiliser pour renforcer la cohésion sociale et la vitalité des villages ?
Je salue le travail du réseau de la MSA. Avec son président Jean-François Fruttero, nous avons signé une convention pour renforcer notre collaboration. Nos deux réseaux doivent être mobilisés pour améliorer la rencontre entre la connaissance du maire et les services de la MSA.
Cette coopération est déjà fructueuse et doit se renforcer autour d’enjeux clés comme la santé, la mobilité, la jeunesse et le logement.
En vue des municipales de 2026, quel message adresseriez-vous à un jeune qui hésite à s’engager comme maire d’un petit village ?
Si vous avez envie de vous engager, poussez la porte de la mairie. Nous avons besoin de vous, et vous avez besoin de nous. Le futur s’écrit au village, et qui mieux que la jeunesse pour le porter ? Retroussez vos manches, faites votre place et apportez vos idées nouvelles.
S’il y a une pénurie de candidats, c’est la preuve qu’il y a de la place : prenez-la et enrichissez nos villages de votre énergie et de votre créativité. Faisons des conseils municipaux un lieu où la jeunesse peut s’exprimer au service de la ruralité.