Prodromos Mavridis : « On critique souvent le manque d’Europe sociale mais on ne parle jamais de ce que l’Union européenne (UE) peut faire pour les travailleurs et les citoyens. Il n’y a jamais eu de Sécurité sociale européenne. Elle est toujours nationale et caractérisée par le principe de la territorialité, ce qui entraîne des conflits de loi.
« Dès 1958, l’UE a institué la libre circulation des travailleurs en instaurant un système permettant de coordonner les régimes nationaux pour éliminer ces conflits. Elle est fondée sur quatre principes :
- égalité de traitement entre nationaux et non nationaux (interdiction des discriminations fondées sur la nationalité) ;
- unicité de législation applicable (une seule loi doit s’appliquer, en principe celle du pays où la personne travaille, compétent pour le prélèvement des cotisations et le paiement des prestations) ;
- totalisation des périodes d’assurance (prise en compte de toutes les périodes de travail dans chaque État membre) ;
- exportation des prestations de sécurité sociale (même si la personne quitte le pays dans lequel elle a travaillé).
« En respectant ces quatre principes, on arrive à protéger les personnes qui se déplacent, sans cumul des législations nationales et sans lacunes dans la protection sociale. Sur le détachement des travailleurs, la réglementation européenne est devenue assez stricte : la société doit exercer des activités significatives dans l’État dans lequel elle est établie, ceci pour éviter le dumping social et la stratégie de contournement des entreprises. »
Anne Sander : « Avant de rejoindre la commission de l’agriculture, j’ai siégé pendant cinq ans à celle de l’emploi. J’y ai bien entendu la difficulté de trouver de la main-d’œuvre dans le monde agricole et de la fidéliser.
« L’Europe est un ensemble de 28 pays, son fondement est la libre circulation des personnes, avec des efforts mis en place pour créer un marché de l’emploi européen. Celui-ci fonctionne aujourd’hui de manière assez limitée : la mobilité dans l’emploi est de moins de 4 %.
« Nous nous efforçons au niveau du Parlement européen de mettre en place des mesures pour permettre une mobilité plus importante : par exemple Eures, un portail européen sur la mobilité de l’emploi et des conseillers dans les régions frontalières, afin de mettre en relation les offreurs et demandeurs d’emploi, ou encore des passeports de compétences pour rendre le marché plus fluide.
« Une discussion se poursuit avec la fameuse directive sur les travailleurs détachés. Le problème n’est pas le principe même du travail détaché mais la manière dont celui-ci a été contourné. Il pouvait donner lieu à des fraudes, des détournements, de la concurrence déloyale, des problèmes en matière de conditions de rémunération des salariés.
« Nous avons voulu sécuriser la chaîne et réintroduire plus de loyauté dans les échanges. Cela permet aussi aux employeurs qui font appel à des travailleurs détachés d’être plus sereins. »
Photos : Luc Pérénom/CCMSA Image
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