Ce n’est pas parce que le Covid-19 sévit dans notre pays qu’il y a moins de cancers, de maladies cardiovasculaires ou de patients suivis à l’hôpital ou en clinique pour des pathologies chroniques. Si certaines consultations jugées non urgentes ont pu être décalées, d’autres, très nombreuses, ont été maintenues. À côté de la guerre contre le virus, dans les hôpitaux ou les cliniques de France, des batailles pour la vie se jouent à l’heure où vous lisez ces lignes. Les professionnels de santé continuent de soigner les Français au quotidien.
Juste derrière les agents hospitaliers chargés de la désinfection des locaux, les médecins, les aides-soignants et les infirmiers au chevet des plus fragiles d’entre nous, des centaines de salariés de la MSA répondent présent pour assurer le service et permettre au système de sécurité sociale de tenir bon pour le bien de tous.
Jérôme Meynsan de la caisse de la MSA Gironde est l’un de ces anonymes qui font face à la crise. Au service santé de la caisse girondine, armé de gants, il traite les transmissions papier et électroniques des factures des hôpitaux et des cliniques. Il permet modestement mais très concrètement au système de continuer à fonctionner malgré le confinement et une France à l’arrêt. Il contribue aussi à permettre aux personnes soignées de recevoir les remboursements auxquels elles ont droit en temps et en heure.
Derrière ces chiffres, il y a des gens qui sont peut-être en chômage partiel ou qui vivent des moments difficiles. »
« Je suis fier du boulot qu’on arrive à produire avec les collègues du service malgré les conditions, souligne-t-il. La mise en paiement rapide est une vraie satisfaction. Dans notre région, nous avons de nombreuses petites mains qui travaillent dans le vignoble, souvent à façon ou à la tâche. Ils ont des petits revenus et quand ils sont hospitalisés, c’est très compliqué financièrement pour eux. Les factures des hôpitaux publics ou privés peuvent rapidement s’accumuler et atteindre des montants importants. Car derrière ces chiffres, il y a des gens qui sont peut-être en chômage partiel ou qui vivent des moments difficiles. Des personnes dont la vie est suffisamment compliquée en ce moment, pour ne pas en rajouter. Le traitement rapide de leurs dossiers permet aux assurés de recevoir le remboursement de la part complémentaire maladie le plus rapidement possible. Notre but ultime est de faire en sorte qu’ils ne se rendent pas compte des changements. » Car Jérôme – comme ses collègues – a adapté son rythme de travail aux nouvelles réalités d’une France confinée. Il se rend deux jours par semaine au bureau, dans les locaux de la MSA Gironde installés au centre de Bordeaux à deux pas de la Garonne. Une présence nécessaire car une partie des factures qu’il doit traiter arrive sous forme de plis postaux. Il bénéficie également de trois jours de télétravail qu’il consacre pour l’essentiel à la gestion des factures télétransmises.
Dès que le confinement a été mis en place, les bureaux ont été nettoyés et désinfectés. Des 450 salariés, ils sont un certain nombre comme lui à travailler sur place en plus de l’agent de sécurité. « Le self est fermé. On amène notre gamelle. Quand on se croise entre collègues, on applique les mesures barrières de sécurité qui sont de maintenir une distance d’au moins un mètre entre chaque personne. Du gel hydroalcoolique ou des solutions savonneuses ont été mis à notre disposition. On privilégie les contacts téléphoniques et on garde les portes ouvertes pour ne pas avoir à toucher les poignées. Malgré tout, comme on se trouve dans un espace vitré, on se voit. Et on se sent moins seul. »
Tous volontaires
Dans ce contexte de suivi d’activité au bureau, le pôle «Fides» (facturation individuelle des établissements de santé) est composé d’un cadre, d’un coordonnateur et d’un technicien soit un tiers de l’effectif au total. « Sur l’ensemble du service santé qui compte normalement environ 80 salariés, nous sommes quatre à être physiquement présents à la caisse en comptant notre chef M. Lladeres », constate-t-il. Des professionnels qui ont complètement repensé leur façon de travailler. « Nous sommes tous volontaires. Tout le monde y met du sien. Pour moi ça tombait sous le sens, car je n’ai pas d’enfant en bas âge et j’habite à deux pas de la caisse. Je n’ai pas à prendre les transports en commun. Je viens à pied. Dans les rues de Bordeaux, à 7h30, on ne croise personne. Toute l’équipe s’est vite adaptée, tout comme certaines procédures, pour répondre aux nouvelles contraintes. Nos chiffres suivent. On n’a pas de retard. »
À ceux qui stressent pour leurs ficus, yucca ou autre plante grasse restée esseulée au bureau, il glisse au passage « pas de crainte… certains d’entre nous arrosent toutes ces belles assoiffées ».
Mais lui comme les autres doivent jongler entre vie familiale et vie professionnelle. Des territoires dont les frontières ont été rendues plus floues par les mesures de confinement et la généralisation du télétravail. Jérôme n’avait jamais goûté au travail dans le salon. « Je trouve ça vraiment très bien. C’est encore plus efficace qu’au bureau. Après l’annonce des mesures exceptionnelles par le gouvernement je repartais dès le lendemain avec mon terminal léger et mon écran à la maison. » Corentin, son fils de 17 ans en terminale S, potasse son bac dans sa chambre. Sa femme Fériel a quant à elle aménagé son bureau dans la chambre du couple. Directrice financière dans une société parisienne, elle rentre habituellement uniquement le week-end à Bordeaux. « Paradoxalement, explique-t-il, alors qu’on devrait se voir plus qu’en temps normal, je la vois peu car elle travaille du matin au soir pour régler les problèmes générés par la crise dans sa société. »
« Je me lève à 5h30. J’ai les baskets aux pieds et mon autorisation dérogatoire de sortie en poche à 6. »
Si Jérôme a fait du salon son nouveau spot de labeur, c’est télé éteinte qu’il pratique le télétravail. « De toute façon, chez nous, c’est soit la télé, soit l’ordi, car le réseau est un peu faible. Et BFM est de toute façon trop déprimante… » Pour décompresser il possède une arme secrète : son jogging matinal. « Je me lève à 5h30. J’ai les baskets aux pieds et mon autorisation dérogatoire de sortie en poche à 6 heures. » À cette heure-là, il n’y a guère que les éboueurs que l’on croise. Entre 45 minutes et 1 heure de jogging, une douche et un petit déjeuner plus tard, le voilà au boulot. « Ce matin je me suis connecté à 8h10. » Un vrai planning de guerrier pour rester en forme au service des assurés de la MSA.