« Rassurant, solidaire, bienveillant ».
Ce sont des mots que Jennifer Miche emploie pour qualifier son métier.
La centrale d’écoute de Présence Verte, située en Lorraine, gère environ 5.500 alarmes déclenchées chaque jour par ses abonnés. S’y relaient plus de cinquante opérateurs, dont Jennifer qui a rejoint l’équipe en 2018. À distance, ils apportent réconfort et sécurité aux personnes équipées et font intervenir, si la situation le nécessite, des membres du réseau de solidarité de l’abonné ou les services d’urgence. Un quotidien très rythmé et un travail qui tranquillise la vie des personnes fragiles, souvent isolées.
« Il n’était pas pensable de mettre le service en arrêt », souligne Jennifer. La pandémie de Covid-19 et les mesures drastiques prises pour limiter le risque de contagion ont en effet mis à mal de nombreuses activités. « Grâce à une réflexion en amont au sein de la centrale d’écoute, des solutions ont été envisagées et le travail à distance a pu être mis en place, sans rupture, dès l’annonce officielle des mesures de confinement. » Une organisation à domicile qui permet de continuer à veiller, de jour comme de nuit, sur des personnes susceptibles d’être confrontées chez elles à un souci du quotidien, une chute, un malaise, un ennui de santé…
« Nous recevons des appels de tout ordre, provenant essentiellement de personnes en perte d’autonomie, âgées, handicapées. Certaines n’ont pas leur famille à proximité et doivent composer en ce moment avec un passage plus limité des professionnels. Elles ont besoin d’être rassurées sur tout : repas, courses, passages de l’auxiliaire de vie, soins… et de savoir que nous sommes présents pour leur répondre, les réconforter et les aider au cas où. »
« Je l’ai sentie désemparée »
Pas d’explosion des appels, mais une augmentation de ceux venant de personnes en mal de contact, et une nécessité d’adapter les réponses au contexte actuel. « Ça peut être un peu plus compliqué qu’habituellement, du fait des restrictions de déplacement qui s’imposent à tous en raison du confinement. Par exemple, nous pouvons être amenés à conseiller à une mamie qui aurait fait tomber une télécommande et ne peut la récupérer toute seule de patienter jusqu’au passage de l’auxiliaire de vie prévu une heure plus tard. Nous devons être encore plus attentifs à tous les éléments d’une situation – identification précise du besoin, degré d’urgence, solutions possibles… – afin de la gérer au mieux et de respecter et faire respecter autant que faire se peut la limitation des déplacements et des contacts. » Et, bien sûr, quand un passage au domicile de la personne s’impose, « nous donnons des conseils aux membres du réseau de solidarité lorsqu’ils veulent bien et peuvent s’y rendre. Certains nous demandent par exemple comment remplir l’attestation dérogatoire requise. Comme il s’agit d’aller aider une personne dans le besoin, le motif à cocher est : déplacements pour motif familial impérieux, pour l’assistance aux personnes vulnérables ou la garde d’enfants ».
Un appel a particulièrement marqué Jennifer Miche récemment : « celui d’une aide de vie arrivée chez l’un de nos abonnés, qu’elle a trouvé étendu sur le sol, la bouche de travers. Elle a immédiatement déclenché l’alarme. Je l’ai sentie désemparée, tiraillée entre la volonté d’aider et la crainte de porter assistance à une personne susceptible d’être porteuse du Covid-19. Du fait de son métier, toujours au contact des gens âgés, elle est très sensibilisée au respect des consignes de sécurité pour éviter la propagation du virus et la contamination. Je l’ai apaisée et, après avoir fait le point avec elle, j’ai appelé le Samu pour qu’il prenne en charge la personne âgée, victime d’un accident vasculaire cérébral. »
Les opérateurs sont rôdés à l’analyse de ce type de contexte : en quelques instants, ils posent les bonnes questions et font le tour de la situation pour la gérer au mieux. « Dans un premier temps, nous contactons les proches et ne sollicitons les secours qu’en cas de besoin. Compte tenu des circonstances actuelles, cela peut aussi permettre de soulager des plateformes d’urgence déjà surchargées. »
Assurant un service à toute heure du jour et de la nuit, les opérateurs de Présence Verte participent encore plus aujourd’hui au besoin de sécurisation et de lien social qui s’exprime. Et Jennifer insiste : « Que les abonnés n’hésitent pas à nous appeler. Ils ne nous dérangent pas du tout, nous sommes là pour eux ».
Photo d’ouverture : Alexandre Roger/Le Bimsa
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