« La Maison familiale rurale du Néracais, spécialisée dans le social et les services, permet aux jeunes en formation professionnelle — de la 4e au Bac — de découvrir et d’appréhender au mieux des notions importantes, telles que l’humanisme, la solidarité, la citoyenneté et le développement durable, qui sont les supports de notre pédagogie », annonce Francine Lavaud, directrice de la MFR de Barbaste, commune de 1 500 habitants nichée au cœur du Lot-et-Garonne. Un état d’esprit qui démontre une confiance sans faille dans la capacité de la jeunesse barbastaise à inventer un futur plus solidaire et plus respectueux de l’environnement.

Cette conviction a naturellement mené l’équipe pédagogique à s’engager dans un projet visant à transformer ses élèves de 4e en ambassadeurs locaux de la transition écologique. Devenus les porte-drapeaux de l’un des cinq « coups de cœur » de l’appel à partenariat national MFR-MSA, ils se sont engagés depuis le début de l’année dans un mouvement qui apporte une réponse concrète à des besoins locaux.

« Le but de ce projet est de participer à l’animation du territoire en mettant en contact les enfants du centre de loisirs et les adolescents de la MFR, pour créer du lien social autour du thème de la transition écologique », assure Julien Piovesan, le jeune moniteur référent des élèves de 4e et 3e, en charge du projet. La bonne idée a été de faire des élèves de la MFR, non seulement des ambassadeurs de la transition écologique, mais aussi les passeurs d’un savoir. On apprend mieux quand on transmet une information à d’autres. Une pédagogie simple à l’efficacité redoutable. Une façon moins formelle d’apprendre, également au bénéfice des enfants du centre de loisirs. « Le contact avec les petits n’était pas évident pour certains ados de la MFR qui appréhendaient la rencontre », poursuit-il. Des peurs surmontées des deux côtés.

Les jeunes se sont apprivoisés au fil du temps et ont fini par devenir d’inséparables défenseurs de la nature. Le combat pour un avenir plus vert rassemble. Ils ont pu constater ensemble que les déchets sauvages peuvent non seulement survivre à l’indélicat qui les a jetés, mais également à ses enfants, à ses petits-enfants… comme un héritage odieux laissé à sa descendance. La prise de conscience de l’impact de l’activité humaine sur l’environnement, cette violence faite à la nature et finalement à nous-mêmes, n’était pourtant pas une évidence pour certains d’entre eux. « Un jeune m’a même expliqué qu’il trouvait que le thème de l’écologie était un sujet de vieux et ne se sentait pas forcément concerné », résume Julien Piovesan.

400 ans pour un sac en plastique

Des réflexions qui, loin de décourager le jeune homme, lui ont permis de prendre conscience du chemin à parcourir pour transformer ses élèves en défenseurs de la nature éclairés. Il les a donc mis au travail. Manches relevées et mains gantées, les actions concrètes ont commencé par une récolte et un tri de déchets dans les rues de Barbaste. La petite troupe était encadrée par des adultes.

Cette moisson hétéroclite a donné lieu à des recherches sur l’origine des matériaux et du temps de décomposition des détritus trouvés. 400 ans pour un sac en plastique. 1000 ans pour un morceau de polystyrène. Cinq ans pour un chewing-gum. De 200 à 500 ans pour une canette en aluminium. Certains déchets ont décidément du mal à se mettre au vert.

Après avoir mis les mains dans le cambouis, les jeunes ont eu l’occasion de prendre un peu de hauteur grâce à « Planète Précieuse », un outil pédagogique original qui aborde de manière ludique les différentes problématiques du développement durable, comme les ressources disponibles, le bien-être des habitants, le partage des terres, le paysage…

« Ils ont pu se rendre compte que faire des choix d’aménagement du territoire est un véritable casse-tête qui entraîne des conséquences en cascade et, au final, est toujours le fruit d’un compromis. Ce n’est évident pour personne de choisir entre implanter une ferme ou une école sur un territoire utile qui n’est pas extensible à l’infini », poursuit Julien Piovesan. Il tient au passage à remercier les membres de l’association locale « Au fil de la Séounes » pour leur aide dans l’animation de la journée. Chaque équipe était composée de quatre élèves de la MFR et de deux enfants du centre de loisirs.

Les jeunes ont ensuite préparé, grâce à trois élèves de terminale venus en renfort, un après-midi récréatif. Au programme : créations de puzzles à partir de photos de déchets, de rébus, d’un jeu de piste au sein de la MFR et de l’écriture de saynètes théâtrales sur le blues des déchets oubliés au bord de la route, alors qu’ils auraient pu être valorisés. Une série d’animations qui ont emballé les enfants du centre.

L’ensemble des actions a rendu possible la co-création d’affichettes et d’une signalétique pour une meilleure gestion des déchets à la MFR et au centre de loisirs. Outre l’aspect éducatif et social, l’objectif ultime de mettre en place une collecte sélective efficace à la MFR ne sera atteint qu’à la rentrée prochaine. Mais les élèves ont déjà imaginé le design des quatre conteneurs qui seront fabriqués sur place avec des matériaux recyclés et qui seront installés à l’automne. Ils ont aussi sélectionné les matières qui seront valorisées : papier, carton, plastique et tout-venant, en se gardant la possibilité d’y ajouter le compost, matière vivante bien plus compliquée à gérer en collectivité. Ainsi, même si le tri n’est pas encore un réflexe, il devrait le devenir à la rentrée prochaine.

« Le plus remarquable pour moi, conclut Julien Piovesan, c’est de constater que certains élèves, qui n’avaient pas la fibre écolo, sont devenus des vrais défenseurs de la nature et m’apprennent même des choses au passage. » Et de citer l’élève qui arrive un jour en classe en ayant fait ses propres recherches : « Vous savez, monsieur, que les habitants d’une petite commune bretonne consomment l’électricité produite sur place par des panneaux solaires installés sur la toiture des ateliers municipaux ? Est-ce qu’on pourrait faire la même chose à Barbaste ? » Une bonne question d’un jeune ambassadeur de la transition écologique ambitieux.

Photos : © MFR de Barbaste