Une enquête menée par le centre de recherche pour l’étude et l’observation des conditions de vie (Credoc) révèle que 49 % des plus de 70 ans considèrent que pour bien vieillir, il faut avant tout « rester à domicile » le plus longtemps possible, avant d’« avoir des amis, des liens affectifs » (38 %).

Le béguin pour le béguinage

La référence est reprise par le rapport national sur l’habitat inclusif rendu au Premier ministre le 26 juin 2020. Les auteurs de ce document inscrivent l’ensemble de leurs recommandations au service d’une vision d’un habitat « accompagné, partagé et inséré [API] dans la vie locale », permettant aux personnes de « vivre chez soi sans être seules », et de rester des habitants acteurs, et non des résidents accueillis.

Au cœur de l’habitat alternatif, on trouve les résidences autonomie dont les Marpa, les résidences services et l’habitat inclusif, connu encore sous le nom de béguinage ou d’habitat regroupé. Cette solution intermédiaire s’adresse aux seniors dépendants ou non et elle épouse différentes formes selon qu’elle est ou qu’elle n’est pas accompagnée par des services d’aide à la personne, partagée par des temps de vie en commun et insérée dans son environnement.

Un habitat, plusieurs possibilités

La MSA Gironde soutient deux projets d’habitat regroupé : celui de Lestiac-en-Garonne dans le cadre de la charte des solidarités avec les aînés du vallon de l’Artolie – la première pierre est posée le 22 février dernier – et celui de Castillon-la-Bataille, par le biais d’une autre charte, celle de Castillon-Pujols, lancée en 2019.

Ces chartes proposent une méthodologie collaborative qui associe le développement social local et l’ingénierie de projet, un accompagnement sur une période de trois ans, un soutien financier de la MSA et un appui technique par ses professionnels.

Elles se décomposent en quatre temps : le diagnostic territorial global, sur la base d’enquêtes menées directement auprès des aînés et sur le recueil des données des acteurs locaux ; une réflexion avec les différents partenaires locaux ; l’optimisation d’actions existantes ou la réalisation de nouvelles, en réponse aux besoins des retraités ou futurs retraités ; et l’évaluation des actions menées auprès des aînés concernés par la démarche.

Un manque criant d’alternatives

Les deux projets d’habitats partagés sont portés par l’association Habitats des possibles. Elle est créée en 2016 par huit citoyens confrontés à l’avancée en âge de leurs proches, ou dans l’interrogation devant le manque criant de choix entre les domiciles individuels et les institutions, particulièrement en territoire rural. Ils sont issus de trois secteurs d’activité : le travail sanitaire et social, la construction et le BTP, l’économie sociale et solidaire.

« À Lestiac, nous intervenons dans une situation où la commune est déjà porteuse de projet, explique Florence Delisle-Errard, fondatrice de l’association. Pour créer un lieu qui répond aux besoins des futurs usagers, pour garantir les conditions d’une entraide et les solidarités futures entre les habitants, pour faciliter l’appropriation du projet sur le territoire, nous initions alors une démarche participative : avec les retraités du territoire, treize ateliers d’assistance à maîtrise d’usage permettent de définir les pièces nécessaires à l’habitat, leur agencement et leurs spécificités. Les architectes interprètent ce cahier des charges et présentent pour correction les plans aux habitants. Puis nous proposons des ateliers de définition du projet de vie de la maison. »

Des méthodes qui matchent

Habitats des possibles accompagne également les collectivités locales et les habitants dans les autres étapes de la mise en oeuvre des projets : outre l’assistance à maîtrise d’ouvrage, les études d’opportunité et de faisabilité, les montages juridique et financier, la recherche de partenariats, et jusqu’à la gestion locative, l’accompagnement individuel ou collectif.

Le projet de Castillon-la-Bataille est également porté par la commune, appuyée par l’association territoires et innovation sociale (Atis). Les méthodes d’intelligence collective d’Habitats des possibles, partenaire de la charte de solidarité avec les aînés, ne peuvent que rencontrer la philosophie du développement social local à la sauce MSA.

Besoins recensés par les élus MSA

« Nous apportons notre soutien financier et nous faisons le lien entre la culture de l’association et la dynamique de ce territoire », indique Aurélie Langevin, responsable du service du développement social à la MSA Gironde. La phase de diagnostic – une enquête menée auprès de plus de 300 seniors vivant sur la communauté de communes de Castillon-Pujols et réalisée en partie par des élus de la MSA Gironde – met en évidence des besoins relatifs à l’accès aux droits et aux services, à la santé, à la mobilité et à l’habitat.

Il en ressort que la majorité des seniors (92 %) vit dans une maison et notamment dans une maison à étage (42 %). Moins d’une personne sur cinq déclare résider dans un habitat isolé, c’est à dire à l’écart d’autres habitations et services. À la question, « Demain, si votre situation devait changer fortement (problèmes de santé, perte de mobilité, perte d’un proche, etc.), quel serait alors votre souhait par rapport à l’habitat ? », 50 % des personnes répondent : « Rester vivre à domicile ». Et si le changement de domicile s’avérait inévitable, 20 % d’entre elles souhaiteraient disposer d’un logement dans une structure collective.

Une kitchenette et une salle d’eau

À Castillon-la-Bataille, neuf logements sont prévus après réhabilitation d’une maison de centre-ville par le partenaire Soliha, bâtisseur de logements d’insertion. À Lestiac, le site est composé de deux corps distincts, une maison en pierre de taille datant du XIXe siècle, et une vaste salle en fond de parcelle.

Il appartient à la commune depuis sa création. Il abrite l’école communale pour garçons et le domicile de l’instituteur, puis la mairie, devient un logement avant d’héberger le siège de la communauté de communes du vallon de l’Artolie jusqu’en 2014. Après rénovation, il pourra accueillir entre huit et dix locataires dans ses 445 m2, dans des espaces privatifs comportant chacun une pièce nuit et une pièce jour, une kitchenette et une salle d’eau. Ils préservent l’indépendance et l’intimité de chacun. Seront partagés en plus : un grand salon, une cuisine équipée et ergonomique, une grande salle à manger, une buanderie ainsi qu’un jardin. Une belle destinée en matière d’habitat, où tout est possible !

Photos : © Habitats des possibles

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