Faire en sorte que l’inclusion des mômes de 0 à 6 ans soit une réalité sur le terrain avec un niveau de qualité satisfaisant dans l’accompagnement, telle est la vocation de Pomme de reinette. Ce dispositif, encore en expérimentation, est déployé depuis 2018 à l’initiative de la MSA Ain Rhône et de ses partenaires. Il vise à aider les familles à la recherche d’un mode d’accueil adapté à leur enfant et à accompagner les professionnels des multi-accueils ou les assistants maternels, sur cette question de l’inclusion des moins de six ans. Le projet est porté par l’association Entraide universitaire spécialisée dans le handicap, avec le soutien du centre d’action médico-sociale précoce (Camps) de l’Albarine, qui en gère la mise en œuvre dans le département de l’Ain (cf. encadré).
Point commun à tous ces acteurs, l’intérêt de l’enfant, de sa naissance à ses six ans, que chacun encadre, éduque ou éveille pour contribuer à son développement et son épanouissement. Cet enjeu est la toile de fond de l’intervention de l’éducatrice qui s’applique à tisser des liens entre les parents dont elle écoute et suit la demande d’un accueil idoine et les professionnels, parfois démunis devant un enfant qui réclame un peu plus d’attention que les autres pour bien ou mieux grandir.
Sa double compétence, la connaissance du champ de l’enfance et celui du handicap, l’aide à mener un travail de minutie avec l’enfant, toujours en concertation avec les parents et les professionnels encadrants. L’objectif étant de réunir toutes les conditions pour que le gamin puisse se développer dans le milieu ordinaire, à son rythme, selon ses aptitudes et sa singularité.
Le centre d’action médico-sociale précoce de l’Albarine
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Aider l’enfant à avancer selon son rythme
« On est là pour soutenir des enfants qui rencontrent des difficultés dans la socialisation dans les premières étapes de leur vie, signale Mélanie Desplat, cheffe de service d’éducation spécialisée et de soins à domicile (Sessad) et du Camps de l’Albarine, installé à Ambérieu-en-Bugey, une ville nichée au cœur de la verdure. Un enfant qui mord et qui tape : cela fait partie du développement. On ne sait pas à quel point cette attitude va être symptomatique. Mais elle va mettre en difficulté les professionnels parce qu’il faut gérer les parents des enfants qui se font mordre et taper, et s’occuper des crises des petits qui tapent et mordent mais qui ne sont pas forcément en situation de handicap. On apporte aussi ce type de solution. »
Les villes de l’Ain bénéficient des services de Pomme de reinette
Autre point commun, le département : Marion Mocellin, référente de Pomme de reinette, intervient sur toutes les communes de ce territoire, n’hésitant pas à parcourir plus de 70 à 90 km pour se rendre dans les structures, chez les familles ou les assistants maternels afin d’y apporter son service. Depuis que le dispositif est actif, les sollicitations ne manquent pas. Beaucoup de professionnels y ont recours (cf. encadré), soulagés d’avoir à leur disposition un tel service, qui est gratuit. En 2021, ils sont 102 à en avoir bénéficié dans 43 lieux différents (selon les chiffres du rapport d’activité du dispositif 2021).
L’action en quelques chiffres
• 42 enfants ont été accompagnés dont 17 avec un dossier de la maison départementale pour les personnes handicapées (8 enfants de moins de 2 ans, 25 entre 2 et 3 ans, 9 de plus de 3 ans).
• Les besoins accompagnés : retard de langage, difficultés dans les interactions, problèmes de comportement dont 8 enfants porteurs d’un trouble du spectre de l’autisme, 3 porteurs d’une maladie génétique, 2 en situation de polyhandicap, 1 enfant avec une déficience visuelle.
• 102 professionnels soutenus sur 43 lieux différents.
• 35 lieux petite enfance accompagnés (24 établissements d’accueil du jeune enfant, 10 assistants maternels, 1 relais petite enfance).
Source : Rapport d’activité Pomme de reinette, novembre 2021 ; le bilan définitif est en cours.
Informer les parents, soutenir les professionnels
« Lorsque nous nous interrogeons sur l’évolution et le comportement de l’enfant, nous contactons nos collègues de Pomme de reinette. Madame Mocellin vient alors faire un temps d’observation, étudier son attitude en collectivité et nous guider vers des solutions permettant de vérifier si nous sommes en face de troubles du comportement ou pas », témoigne Valérie Signoret, directrice de la crèche Arc-en-ciel, installée à une vingtaine de kilomètres de Pomme de reinette. La relation avec les familles est cruciale dans ces moments-là.
« Madame Mocellin nous aide petit à petit à faire part aux parents des observations et à les orienter vers des prises en charge plus adaptées. Elle nous soutient dans ce relationnel délicat », indique la responsable de la structure à gestion municipale, qui reçoit des enfants de deux mois et demi jusqu’à cinq ans. Une amplitude d’âge qui étonne de prime abord. « Les plus de trois ans ont besoin d’un mode d’accueil le mercredi et pendant les vacances, justifie-t-elle. Mais il y a aussi d’autres raisons. Souvent les enfants en situation de handicap ne sont pas scolarisés dès leurs trois ans. Nous continuons de les accueillir même âgés de quatre ans et nous travaillons avec les familles ainsi qu’avec les professionnels qui s’en occupent parce que le Camps n’a parfois pas de place. Ils sont alors suivis en ville par des professionnels libéraux que nous recevons sur l’établissement. »
L’inclusion est dans la réglementation
« L’inclusion fait partie de sa mission, tient-elle à préciser. Les structures ont toujours eu pour mission d’accueillir les enfants présentant des besoins particuliers. C’est dans la réglementation. » Elle regrette juste de ne pouvoir en faire plus. « Ils arrivent avec des fragilités et des faiblesses qui méritent un peu plus d’attention. Nous nous organisons pour leur accorder du temps mais pas toujours car nous sommes dans un accueil collectif, contrairement aux assistants maternels. Parfois les petits ont besoin de relations plus individuelles que collectives. Et là nous sommes souvent coincés. » C’est pour cette raison qu’elle entrevoit avec bonheur la création de Pomme de reinette.
Pomme de reinette
Pomme de reinette n’est pas simplement le titre d’une comptine, c’est aussi un service dédié à l’inclusion des plus petits dans les crèches. L’appellation est un clin d’œil à la petite chanson que tous les enfants et parents qui se respectent connaissent sur le bout des doigts. Le choix de cette référence en guise de nom est destiné à positionner le service dans une dynamique rassurante. D’abord par rapport à son ambition d’accompagner les familles en quête d’une solution pour aider leur petit à grandir dans les meilleures conditions, ensuite par rapport à sa volonté d’accompagnement les structures d’accueil qui le souhaitent.
« L’idée est d’avoir un logo sympathique et simple, épuré. Et ça marche !, se réjouit Mélanie Desplat. Parfois on nous dit pomme d’api. » Toute l’équipe du Camps de l’Albarine a participé au choix du nom, à commencer par Catherine Cocozza, la directrice départementale du dispositif de l’Ain de l’Entraide universitaire (également porteuse du projet). Avec Pomme de reinette, c’est un métier de dialogue, d’écoute qui s’exerce à l’échelle d’un département que les structures et les parents qui en ont bénéficié plébiscitent.
Parfois le dispositif peut être utilisé pour consolider une solution de garde existante. Les parents ont par exemple déjà travaillé avec la crèche sur une modalité d’accueil de leur petit. Ils ont organisé son adaptation à la vie collective selon des temps courts et longs pour l’habituer progressivement. « Mais lorsque l’accueil est mis à mal par son comportement et que les encadrants sont un peu dépassés, n’ayant pas les outils pour y faire face, ils peuvent directement faire appel à Pomme de reinette, avec l’accord de la famille. Madame Mocellin se rend sur place pour y effectuer une observation de l’enfant, évaluer ses besoins et faire un retour à la famille et aux professionnels pour mettre en place des aménagements spécifiques », explique la cheffe de service Camps et Sessad.
L’appui du centre d’action médico-sociale précoce de l’Albarine
Marion Mocellin peut aussi compter sur la force du dispositif qui a été délibérément adossé au Camps, de façon à élargir la palette des réponses apportées aux petits qui présentent un handicap trop important. « C’est une bonne idée, souligne Mélanie Desplat. Le Camps accueille les enfants de 0 à 6 ans qui présentent un handicap. On est dans le champ du dépistage et du diagnostic : cela fait partie des services que je gère. Il y a ainsi une facilité de basculer sur cet accompagnement-là si la situation est trop lourde à gérer et que l’enfant connaît de grandes difficultés ou des retards de développement » Cette articulation est voulue par la MSA, la CAF, l’ARS au nom de l’efficacité de Pomme de reinette.
Les prochains mois sont cruciaux pour ce dispositif puisqu’après trois ans d’exercice, l’heure est bientôt au bilan. « Nous allons travailler avec la structure sur l’évaluation cette année. Nous sommes en expérimentation, rappelle Nathalie Boyer, chargée d’études famille à la MSA Ain-Rhône en charge du suivi du projet. L’enjeu aujourd’hui pour nous, sur le plan local, c’est de pouvoir en identifier les bénéfices pour l’inscrire dans la durée et le pérenniser parce que nous voyons que concrètement l’accueil des enfants en situation de handicap ne se décrète pas. C’est encore compliqué. »
Contact
Les services de Pomme de reinette sont gratuits pour les professionnels et les familles.
• www.eu-asso.fr/pomme-de-reinette
• Tél. : 04 37 61 01 39 06 – 06 35 97 50.
• E-mail : mmocellin@eu-asso.fr.
• Adresse : 86, avenue Général Sarrail, 01500 Ambérieu-en-Bugey.