« Je suis un peu casse-cou », reconnaît volontiers Monique Lamier, habitante de Villepinte, en Seine-Saint-Denis. Un peu ? Jugez plutôt : c’est perchée sur la table de sa salle à manger, à laquelle elle accède par le truchement d’une chaise, que la septuagénaire continue d’astiquer ses vitres ! L’acteur Buster Keaton n’aurait pas fait plus acrobatique(1).
Elle n’est pas belle, la vie ?
Mais ce mercredi 24 mai, stop les galipettes ! Monique, sagement assise, répond aux questions que lui pose Laurine Maire, ergothérapeute chez Bel’Avie. Cette structure spécialisée dans l’adaptation du logement opère dans l’assistance à maîtrise d’ouvrage.
Ce matin, Laurine réalise un diagnostic pris en charge par la caisse nationale d’assurance vieillesse pour le compte de son partenaire, prévention retraite Île-de-France (Prif) (2).
Pour Monique la cascadeuse, le tableau est le suivant : le bilan de santé révèle un ancien trauma ― « Une fracture de la clavicule après avoir raté la première marche d’un escalier » ― des affections au niveau du dos (arthrose, ostéoporose) et des yeux (photophobie).
Ce qui se traduit par, outre des difficultés à la marche ― « Je souffre beaucoup en montant les côtes ; lorsque l’ascenseur est en panne, je fais des pauses régulières pour avaler les quatre étages de mon immeuble et j’ai cessé de me rendre au club de généalogie à Paris car les escaliers du métro sont devenus insurmontables » ― quelques anecdotes tragi-comiques. « La dernière fois que nous sommes allées dans les magasins, ma petite-fille et moi, elle rigolait car j’avais tendance à heurter les miroirs », badine-t-elle.
Sans compter les poteaux qu’elle embrasse régulièrement sur les trottoirs lors de ses pérégrinations, car elle est obligée de baisser la tête pour supporter la lumière du jour. Pour conduire, elle adopte la panoplie double coussin ajusté sur le siège conducteur et casquette à visière pour contrer les rayons du soleil.
« Je ne veux pas entrer en Ehpad »
Dans son appartement, qu’elle loue seule, aucune aide à domicile ne met les pieds. « J’ai dit à ma petite-fille, en plaisantant, que je ne voulais surtout pas entrer en Ehpad. Mais c’est vrai, le plus important pour moi, c’est d’adapter mon logement afin de préserver mon autonomie. » Si Monique réalise tous les actes de la vie quotidienne quasi sans encombre, Laurine préconise des aménagements dans une logique de prévention, celle qui justement, fait encore trop cruellement défaut dans notre société.
Par exemple, dans la salle de bain : « Installer un receveur de douche extraplat antidérapant, des parois pliantes, un mitigeur thermostatique, une barre d’appui horizontale et un siège sans accoudoir fixé au mur ». Entre la chambre à coucher et la terrasse, où la marche d’accès est trop haute : « Une barre d’appui de 45 centimètres à la verticale et une marche supplémentaire ».
Ailleurs : que dire d’un petit escabeau avec des pieds et des marches antidérapantes et deux barres de maintien pour accéder aux éléments hauts de la cuisine ou d’une pince à long manche pour récupérer la télécommande ou le stylo tombés à terre sans avoir à se baisser ?
Dans le cas de Monique, locataire, le rapport de Laurine lui sera adressé ultérieurement. Elle pourra alors à son tour transmettre le devis des aménagements à son bailleur, qui décidera ou non d’engager tout ou partie des travaux. Différentes aides financières peuvent être sollicitées sous conditions, selon que l’on est propriétaire occupant ou locataire(3). Ce qui signifie que, peut-être, Monique continuerait à se prendre pour une voltigeuse en astiquant ses vitres mais plus sans filet !