En matière de manutention, le chariot automoteur est un matériel incontournable qui a conquis sa place dans les exploitations et les coopératives agricoles comme dans le secteur industriel. Mais comme pour toute machine amie de l’homme, il est soumis au respect de quelques obligations réglementaires pour minimiser les risques professionnels inhérents à son utilisation.

Depuis le début de la crise sanitaire liée à la propagation du coronavirus, la MSA Dordogne, Lot et Garonne poursuit ses actions de prévention auprès des exploitants, des salariés agricoles et des employeurs de main-d’œuvre en continuant d’organiser des formations sur le terrain, tout en respectant à la lettre le protocole Covid-19.

Quand réaliser la vérification générale périodique ?

« Le chariot automoteur de manutention à conducteur porté est notamment très utilisé dans les coopératives fruitières – dans les stations de séchage de prunes, par exemple – mais également par les exploitants et les petites entreprises. Sur le terrain, nous constatons des défauts de réalisation de vérification générale périodique (VGP), réglementairement fixée tous les six mois pour les appareils de levage et tous les ans pour les accessoires », explique Stéphane Sacases, conseiller en prévention.

Qui est concerné ?

Un tracteur avec un chargeur frontal ou un chariot télescopique sont des appareils de levage, tout comme les chariots élévateurs. Ils sont donc soumis à une VGP tous les six mois.

Qui est concerné par la vérification générale des appareils de levage ? Légalement, tous les employeurs de main-d’œuvre (1). Une obligation qui, a priori, ne vaut pas pour les exploitants non employeurs (2).

Cependant, l’article R.4322-1 du code du travail stipule que « les équipements de travail et moyens de protection, quel que soit leur utilisateur, sont maintenus en état de conformité avec les règles techniques de conception et de construction applicables lors de leur mise en service dans l’établissement, […] ».

Et l’article L.4311-3 qu’il « est interdit d’exposer, de mettre en vente, de vendre, d’importer, de louer, de mettre à disposition ou de céder à quelque titre que ce soit des équipements de travail et des moyens de protection qui ne répondent pas aux règles techniques […] et aux procédures de certification ».

« Ce qui induit, pour un exploitant non employeur, le maintien en conformité de son équipement de travail, en particulier s’il souhaite le prêter : cas de l’entraide ou de partage de matériel comme dans les coopératives d’utilisation de matériel agricole (Cuma) », prévient Benoit Moreau, conseiller national en prévention des risques professionnels à la CCMSA.

Une sinistralité forte, des arrêts de travail plus longs

L’enjeu, comme souvent quand il s’agit de prévention des risques professionnels, est de taille, au regard de la sinistralité enregistrée sur ce type de matériel : une moyenne annuelle de 275 accidents avec arrêt de travail entre 2010 et 2018, en France métropolitaine, chez les salariés et les non-salariés agricoles.

Avec pour particularités : des arrêts de travail plus longs que la moyenne – 93 jours, contre 68 pour l’ensemble des machines en agriculture – et des accidents de travail plus graves, affichant un taux moyen d’incapacité permanente partielle (IPP) de 16,4, contre 12,1 !

« Au niveau national, tous régimes de protection sociale confondus, on dénombre 8 300 accidents avec arrêt de travail par an et 10 décès chez les salariés liés, dans un cas sur deux, au renversement latéral du chariot (3), précise Stéphane Sacases. La première cause d’accident est la collision entre un chariot et une personne évoluant à proximité. »

Un partenariat avec AgroCampus 47

Dont acte. Depuis plusieurs années, la MSA Dordogne, Lot et Garonne développe un partenariat avec AgroCampus47, qui regroupe plusieurs établissements d’enseignement agricole de Lot-et-Garonne, dont un centre de formation professionnelle et de promotions agricoles (CFPPA), pour les adultes (sites de Sainte-Livrade-sur-Lot et Nérac).

« Nous ne voulons pas faire de concurrence aux organismes de formation, assure le conseiller en prévention. Nous souhaitons simplement développer notre offre de services en amorçant le besoin. À terme, nous visons l’autonomie du centre de formation sur cette solution adaptée à notre cible issue du monde agricole. »

Objectif : démultiplier la formation en interne

Ainsi, deux sessions certifiantes «attestation à la conduite en sécurité» (Aces) du chariot automoteur de manutention à conducteur porté se tiennent les 27 et 30 novembre dernier.

En tout, seize exploitants, employeurs de main-d’œuvre et salariés y participent : maîtriser la conduite des chariots élévateurs, connaître sa machine, les règles d’une conduite en sécurité, les risques d’accidents et d’incidents pour les éliminer, et en assurer l’entretien simple…

Deux journées idéalement réparties entre enseignements théoriques et pratiques, dont le coût est entièrement pris en charge par la MSA Dordogne, Lot et Garonne (4). L’intervenant est Cédric Castagnier, contrôleur technique et formateur du cabinet Deslandres, spécialisé dans l’expertise de véhicules et le contrôle des appareils de levage.

« Nous souhaitons mettre en relation les adhérents avec les organismes de contrôle. Nous ciblons particulièrement les chefs d’exploitation et les petites structures agricoles qui mettent des chariots à disposition de salariés occasionnels afin qu’ils puissent démultiplier la formation en interne. »

Attestation à la conduite en sécurité

Rappel réglementaire : la conduite de certains équipements présentant des risques particuliers, en raison de leurs caractéristiques ou de leur objet, est subordonnée à l’obtention d’une autorisation de conduite délivrée par l’employeur (article R. 4323-56 du code du travail).

Pour délivrer l’autorisation de conduite d’un type de machines à un salarié, tout employeur doit vérifier que celui-ci est médicalement apte à conduire l’engin en question (suite à l’avis rendu à l’issue de l’examen d’aptitude médicale réalisé par le médecin du travail) ; qu’il est capable de conduire en sécurité l’engin en question, après contrôle des connaissances et du savoir-faire du conducteur pour la conduite en sécurité (c’est le résultat d’une évaluation réalisée en interne ou en externe) ; qu’il connaît les lieux ainsi que leurs règles particulières (circulation, coactivité, etc.).

Pour que l’employeur soit en capacité de délivrer une autorisation de conduite, les participants de la formation repartent avec un bagage pédagogique (5).

Notes

(1) La vérification générale des appareils de levage est définie dans l’arrêté du 1er mars 2004 et dans les articles du code du travail R4323-22 à 28, et plus particulièrement du 23 au 27 pour la vérification générale périodique (VGP).

(2) Rappelons qu’un exploitant devient employeur dès l’instant où il accueille un stagiaire, un apprenti, un salarié… même sur une courte période.

(3) : Généralement, le cariste est éjecté de son siège et est écrasé par la structure de protection du chariot. Données : institut national de recherche et de sécurité (INRS).

(4) Dossiers montés avec des fonds émanant de l’opérateur de compétences pour l’agriculture, la pêche, l’industrie agro-alimentaire et les territoires (Ocapiat).

(5) Par ailleurs, un pack de formation, primé au Sommet de l’élevage 2020, est né d’un partenariat entre la MSA Auvergne, Jean-Noël Allary, enseignant au lycée agricole du Breuil-sur-Couze, et l’Asfauvergne, organisme de formation. Il est intitulé « J’M utiliser les automoteurs de levage et de manutention à mât télescopique en sécurité ». Bientôt disponible en e-learning. Prix coup de cœur du jury aux Sima innovation awards 2021 : https://bit.ly/3tMbIRp (lire page 17 du document).