Le CAF rassemble les Jeunes Agriculteurs, la FNSEA, les chambres d’agriculture, la confédération nationale de la mutualité, de la coopération et du crédit agricoles (CNMCCA). Il rappelle en préambule du manifeste qu’il a publié les différents apports du secteur primaire à la société française : sa fonction nourricière, remise en lumière à la faveur du premier confinement, et l’inscription de la souveraineté alimentaire en tête des préoccupations du pays ; son rôle de structuration des territoires et de leur vitalité économique, avec un regain d’attrait pour la ruralité ; son adaptation face aux enjeux environnementaux, de biodiversité et de lutte contre le changement climatique.

Le vivre ensemble doit aussi faire partie des ambitions des territoires : c’est un champ à coconstruire, dans le dialogue et le respect de chacun.

Le CAF pointe pourtant que « sans une action forte et déterminée des pouvoirs publics pour accompagner les agriculteurs dans leur démarche pour satisfaire les nouvelles attentes exprimées par la société (traçabilité de l’alimentation, diversité des choix alimentaires, impacts sur l’eau, l’air, le sol et la biodiversité, bien-être animal, réappropriation économique des territoires ruraux, vivre ensemble, etc.), l’agriculture risque fort de perdre sa dynamique ». Il estime « urgent de donner à l’agriculture française les moyens de réaliser pleinement ses performances au service de nos concitoyens et de nos territoires ».

Dans la perspective de la prochaine élection présidentielle, les propositions qu’il formule s’articulent autour de cinq voies d’amélioration.

Mieux produire

L’éventail d’aliments disponibles en France, issus de sols et de systèmes de production variés, font que la diversité de l’agriculture française reste un modèle envié dans le monde entier. « C’est elle qui permet de produire en quantité, en qualité, pour tous les budgets et qui répond à tous les choix alimentaires. Cette diversité est aussi la condition essentielle de reconquête de la souveraineté alimentaire. »

Pour cela, le CAF appelle à « valoriser l’acte de production en France, en mobilisant tous les outils (normes techniques dont l’étiquetage, sociales, fiscales, environnementales…), à ne pas sur-contraindre les agriculteurs avec des réglementations nationales sans étude d’impact ni de faisabilité technico-économique, à traquer les pratiques de concurrence déloyale (en particulier en vis-à-vis des produits importés qui ne répondent pas aux mêmes exigences sanitaires et environnementales) ». Il engage aussi à « éduquer et informer le consommateur sur les pratiques agricoles, l’origine des produits et le juste prix de l’alimentation », autant de « prérogatives d’un gouvernement qui a, dans ses priorités, une alimentation saine et durable pour tous les citoyens français ».

Mieux promouvoir les métiers, installer, former, transmettre

Pénurie de main-d’œuvre, arrivée de nouveaux entrants ne compensant pas le nombre de départs, le compte n’y est pas pour le renouvellement des générations agricoles, tant chez les exploitants que chez les salariés. Face à ce défi, « l’attractivité des métiers de l’agriculture doit être assurée par des mesures adaptées, afin notamment qu’ils soient clairement identifiés très tôt dans les parcours d’orientation ».

C’est pourquoi, suggère le CAF, « il faut lever les contraintes qui pèsent sur l’installation de nouveaux agriculteurs, qu’ils soient issus ou non du milieu agricole, en particulier en facilitant l’accès au foncier, notamment par le portage foncier. Il faut aussi accompagner chacun par une formation initiale rénovée ainsi qu’une formation continue tout au long de leur carrière pour toujours mieux s’adapter ». Il rappelle également que les agriculteurs doivent pouvoir « dégager de la valeur, en assurant un revenu à la hauteur de leur engagement professionnel. La retraite doit aussi être décente pour tous les actifs de l’agriculture, et un accompagnement effectué pour que fins de carrière soient synonymes de transmissions d’exploitations réussies ».

Mieux valoriser les expertises et les services environnementaux rendus

Face au changement climatique et la multiplication imprévisible des aléas, l’agriculture a engagé une transformation lourde et de long terme. La profession, indique le CAF, « rend de nombreux services environnementaux qui compensent les émissions des secteurs d’activité plus polluants, comme la captation du carbone pour la réduction des gaz à effet de serre, ou qui favorisent la biodiversité et les habitats favorables aux insectes pollinisateurs par la plantation de haies, des jachères mellifères, des rotations allongées. L’agriculture française est aussi un acteur de l’économie circulaire et de la transition énergétique en fournissant des sources d’énergies renouvelables via la méthanisation, l’agrivoltaïsme ou l’éolien ».

Les auteurs des propositions soulignent qu’il faut agir sur trois leviers pour garantir la réussite de la transition agroécologique : « assurer aux agriculteurs les moyens financiers, agronomiques et assurantiels pour poursuivre leurs investissements, les rémunérer pour leurs actions en faveur de l’environnement et lever les verrous de l’innovation pour accélérer et généraliser la transformation ».

Mieux interagir au service du développement des territoires

Sur les espaces ruraux coexistent aujourd’hui des populations diverses. La population agricole y est en minorité et les campagnes sont de plus en plus considérées comme des lieux de résidence, moins investies pour leurs fonctions de production. Ce qui entraine parfois des incompréhensions, tensions ou conflits d’usage.

Le CAF considère pourtant que les territoires ruraux « sont à la fois une réponse aux attentes sociétales et un gage de relance économique. Pour cela, il faut mettre au cœur des priorités l’activité économique des zones rurales et le vivre ensemble qui en découle : les politiques publiques doivent impérativement s’adapter aux spécificités de ces territoires en termes d’emploi, d’accès aux services publics et privés, et au numérique. Enfin, l’État doit favoriser, accompagner et sécuriser les approches et les projets de territoriaux, portés par les acteurs locaux ; comme les projets alimentaires territoriaux (PAT) ou les projets de territoire pour la gestion de l’eau (PTGE). Le vivre ensemble doit aussi faire partie des ambitions des territoires : c’est un champ à coconstruire, dans le dialogue et le respect de chacun ».

Mieux produire en Europe

Dans sa dernière proposition, le manifeste appelle également à « réaffirmer les fondements de la politique agricole commune (PAC) en matière de souveraineté alimentaire durable et à préserver les capacités de production de l’agriculture européenne, en l’accompagnant d’une politique commerciale intra et extra-européenne juste et équitable. L’Union européenne doit retrouver la voie d’une politique agricole et alimentaire forte. Plus que jamais, le marché commun doit, 64 ans après la signature du Traité de Rome, devenir un réel marché unique au sein duquel les agriculteurs de chaque pays produisent et vendent selon les mêmes règles. D’autant plus si celles-ci sont parmi les plus drastiques au monde ! »

À l’image de ce qui avait eu lieu en 2017, un grand oral est prévu le 31 mars avec les principaux candidats à l’élection présidentielle afin de connaître leur vision pour l’agriculture au sein de la société française.

Photo : © Franck Beloncle/CCMSA Image