Le 6e art s’invite à Andouillé, une commune de 2 314 habitants nichée au cœur de la Mayenne, par la puissance de l’imagination et de la volonté d’un groupe de huit jeunes porteurs d’un projet de festival, l’Arbre bavard. Pendant plus d’un an, Manon Savary, Emma Filleul, Esteban Fouchet, Méline Ferron, Élise Vauvelle, Yvan Uttaud-Gallot-Lavallee, Guillaume Salmon et Alisma Boulay, tous des étudiants en art, théâtre, cinéma, beaux-arts, son, ont rêvé d’une fête en plein air dédiée à l’art vivant et à la création. Les 7 et 8 août, ces amis, âgés de 20 à 23 ans qui se sont rencontrés au conservatoire d’art dramatique de Laval ou sur les bancs de la fac, l’ont exaucé, donnant à la population du coin et à tous ceux qui n’ont pas l’habitude d’aller au théâtre, l’occasion de vivre des moments forts de joie et de poésie au milieu de la nature.
Chaque année, la MSA encourage la créativité et l’animation des territoires par les jeunes grâce au déploiement du dispositif d’appel à projets jeunes. Le festival de l’Arbre bavard est l’un d’entre eux. Le concert inclusif dans le petit village haut-saônois Lavigney en est un autre.
Découvrez tous les lauréats de l’édition 2021.
Un moment fort de partage
Douze jeunes compagnies de théâtre et trois groupes de musiciens venant de toute la France et de Belgique ont mis le feu tout au long du week-end, proposant du théâtre, de la danse, de la musique, des balades contées, du cirque. « Je suis fière d’avoir réussi à organiser un événement de cette ampleur avec l’équipe. Nous l’avions en tête. Nous l’avons imaginé et nous l’avons réalisé. Le fait de voir que le festival s’est passé et que tout s’est bien déroulé, c’est un accomplissement », se félicite aujourd’hui Alisma, initiatrice du projet et présidente de l’association de l’Arbre bavard, qui a mis à disposition du festival la propriété familiale, composée d’une grange, d’une maison et d’un immense champ boisé de plus d’un hectare.
« À la campagne on va moins au théâtre. Il s’agit d’offrir un festival tout près du lieu de vie des habitants vivant en milieu rural qui ne soit pas payant et qui ne demande rien. Les bénévoles ont fait des criées dans les villages environnants et distribué des flyers dans les marchés . »
Emma Filleul, 20 ans, étudiante en animation socioculturelle, référente des artistes.
Pendant ces deux jours, à partir de 13 h 30, après avoir montré la patte blanche du passe sanitaire (au moins pour les 12 ans et plus), petits et grands sont venus dans ce domaine privé applaudir l’un des douze spectacles proposés gracieusement par les artistes sur quatre scènes différentes, installées à chaque coin du terrain. Les espaces ont accueilli des jauges de 10 à 20 personnes, respectant les mesures sanitaires, recommandées dans le contexte du Covid. La durée de chaque représentation à ciel ouvert ne dépasse pas les 30 à 45 minutes, ce qui permet de jouer 2 à 3 fois un spectacle au cours de l’après-midi. À 21 h, les couche-tard ont apprécié un concert de musique sous un ciel tapissé d’étoiles scintillantes.
D’un spectacle à l’autre
Les distances entre chaque espace de représentation étaient suffisamment grandes pour donner au spectateur l’impression de déambuler sans transition d’un milieu à l’autre, de l’espace scénique de l’art vivant à celui de la nature, avec sa panoplie d’accessoires on ne peut plus vivants. Au fil de sa promenade, il pouvait par exemple croiser le regard fixe et guère effarouché de chèvres qui, retranchées derrière leur enclos rempli d’herbe bien croquante, n’ont pas perdu une seule miette des pièces qui se sont jouées sous leur museau tout au long de la journée sur la scène plantée, à quelques mètres d’elles. Non loin de là, des poules et des coqs sont restés imperturbables malgré les allées et venues du public (300 par jour). Tout à leur quête de grains enfouis dans la terre, ils ont continué à creuser minutieusement le sol à l’aide de leur bec.
Une association qui réseaute
Sitôt quitté chaque scène, on bascule dans le spectacle de la nature, comme invité à « écouter le bavardage » de cette autre figure clé du festival, ainsi que le clame le nom même de l’événement. « Il lui rend hommage, raconte la Mancelle Emma Filleul, étudiante en animation socioculturelle de 20 ans, qui s’est occupée de la réception et de l’accompagnement des artistes. « Yvan voulait faire des installations sonores dans les arbres. Ce qui a donné des plantes qui parlent, d’où le nom “Arbre bavard”. Le lieu vit. Il parle. Il est beau… » Le cadre est propice à la rencontre entre nature et culture, un effet voulu par les organisateurs.
« On voulait favoriser ce lien. La campagne, rappelle Alisma, est l’un des éléments importants de ce rendez-vous. C’est vital de mettre la nature à l’honneur pour apprendre à mieux la connaître, à en prendre soin, à la protéger. Et c’est aussi une façon d’engager à être plus proche de l’essentiel, de ce qui nous entoure, à être sensible aux autres. »