En 2006, Dominique Marchal, céréalier de Meurthe-et-Moselle, est la première personne à être reconnue en maladie professionnelle auprès du tribunal des affaires de Sécurité sociale (Tass) des Vosges. Il est atteint d’un cancer du sang depuis 2002.

En 2010, il se rend en Charentes où il rencontre Paul François, un céréalier, et d’autres agriculteurs malades après une utilisation professionnelle de pesticides. Ensemble, ils décident de créer l’association Phyto-victimes, qui voit le jour le 19 mars 2011. Lorsqu’en 2016, la cour d’appel de Metz juge sa demande d’indemnisation à l’État non recevable, Dominique Marchal milite avec Paul François, alors président de Phyto-victimes, pour la mise en place d’un fonds d’indemnisation des victimes de pesticides.

Il est ébauché et discuté par les parlementaires depuis 2016. C’est à partir de la loi du 30 octobre 2018 pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible (Egalim) qu’Agnès Buzyn, alors ministre de la Santé, engage la création de ce fonds dans le cadre du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2020.

Le 29 octobre 2019, l’Assemblée nationale approuve enfin sa mise en place. Il est créé au 1er janvier 2020 et le texte réglementaire fixant ses modalités d’organisation et de fonctionnement est publié le 29 novembre 2020.

La MSA, forte de sa connaissance du risque pesticides et de son expertise concernant les démarches de reconnaissance de maladies professionnelles et l’instruction de ces demandes, s’est vue confier par l’État la gestion de ce fonds et l’instruction des demandes d’indemnisation.

Quels sont ses enjeux ?

Ce dispositif répond à trois enjeux majeurs : l’équité dans l’indemnisation des victimes quel que soit leur régime d’affiliation professionnelle ; la solidarité nationale envers les victimes grâce à un financement étendu ; et la simplification des démarches à accomplir par les victimes grâce à une gestion centralisée.

En effet, la MSA, au nom du fonds, agit pour le compte du régime général, du régime agricole (salariés et non-salariés) et du régime d’Alsace-Moselle ; ce qui permet de faciliter la reconnaissance des maladies professionnelles à travers une procédure plus simple et plus juste.

A qui s’adresse-t-il ? 

Jusqu’à présent, seules les personnes exposées aux pesticides dans le cadre de leur activité professionnelle ayant entraîné une maladie professionnelle sont concernées par une indemnisation.

Le texte a élargi aux enfants exposés pendant la période prénatale du fait de l’exposition professionnelle de l’un ou des deux parents et qui a provoqué une pathologie, quel que soit le régime d’appartenance du ou des parents.

Les non-salariés agricoles actifs ou retraités, les anciens exploitants, leurs conjoints et les membres de la famille bénéficiaires d’une pension de retraite agricole qui ont cessé leur activité avant le 1er avril 2002 ou les non-salariés agricoles déjà indemnisés pour une maladie professionnelle en lien avec les pesticides avant le 1er janvier 2020 peuvent bénéficier d’un complément d’indemnisation, au titre de la solidarité nationale.

Les personnes exposées aux pesticides en tant que riverain ou utilisateur pour usage personnel ne sont pas concernées, tout comme celles ayant fait l’objet d’un refus d’indemnisation pour une maladie professionnelle avant le 29 novembre 2020 (elles pourront déposer une nouvelle demande uniquement en cas de création ou de révision du tableau de maladies professionnelles) ou celles relevant de la fonction publique ou d’un régime spécial.

Quels en sont les instances ? 

Le fonds d’indemnisation des victimes de pesticides est constitué de trois instances.

  • Le premier maillon, le comité unique de reconnaissance des maladies professionnelles dédié aux pesticides, examine les demandes d’indemnisation liées à l’exposition aux pesticides dans un cadre professionnel quand la pathologie concernée ne figure dans aucun tableau de maladies professionnelles ou lorsqu’une des conditions du tableau n’est pas remplie.
  • Le deuxième, la commission d’indemnisation des enfants, examine les demandes les concernant et établit le lien entre la pathologie de l’enfant et son exposition prénatale aux pesticides.
  • Le troisième, le conseil de gestion, a pour rôle de définir la politique et les orientations concernant les procédures de l’indemnisation des enfants, de fixer les orientations relatives aux conditions d’action en justice du fonds. Il approuve également le rapport annuel retraçant l’activité du comité unique de reconnaissance des maladies professionnelles dédié aux pesticides et de la commission d’indemnisation des enfants victimes d’une exposition prénatale.

Il est composé de dix-sept membres : sept représentants de l’État, deux représentants des organismes de Sécurité sociale (CCMSA et Cnam), un membre proposé par les organisations nationales d’aide aux victimes de pesticides, un membre proposé par les fabricants de pesticides, deux personnalités qualifiées par leur expertise (dans le domaine des effets des pesticides sur la santé et en matière de réparation du dommage corporel) et quatre représentants des organisations représentatives patronales et syndicales.

Qui instruit ? 

Le directeur général de la CCMSA, qui est également directeur du fonds d’indemnisation, a délégué l’instruction des dossiers à la MSA Mayenne-Orne-Sarthe, conformément aux dispositions législatives et réglementaires. 

Cette dernière instruit les demandes d’indemnisation des maladies professionnelles liées aux pesticides pour l’ensemble des personnes concernées grâce à la mise en place d’un collège médical composé de cinq médecins. Celui-ci statue sur toutes les demandes et permet ainsi un traitement équitable et homogène de l’ensemble des dossiers sur tout le territoire, en lien avec les caisses d’affiliation des assurés.

Concernant les victimes professionnelles, deux cas de figure peuvent se présenter. Si la maladie est inscrite à un tableau de maladies professionnelles, le collège médical Mayenne-Orne-Sarthe statue et le fonds d’indemnisation rend alors sa décision. Soit la maladie est inscrite à un tableau mais les conditions ne sont pas remplies, soit la maladie n’est pas inscrite au tableau, et dans ce cas le collège médical transmet le dossier au comité de reconnaissance des maladies professionnelles dédié aux pesticides pour qu’il rende son avis motivé.

La MSA Mayenne-Orne-Sarthe, qui agit pour le compte du fonds, notifie, sur la base de cet avis, la décision d’accord ou de refus. C’est également le collège médical qui fixe la date de guérison ou de consolidation et détermine le taux d’incapacité permanente partielle.

Concernant l’instruction des demandes d’indemnisation pour les enfants, la caisse instructrice constitue le dossier et engage les investigations nécessaires relatives à l’exposition d’un des parents. La commission d’indemnisation des enfants se prononce sur le lien entre la pathologie de l’enfant et l’exposition professionnelle aux pesticides de l’un des parents. En cas d’accord, elle adresse ensuite une offre d’indemnisation à l’enfant victime ou à ses représentants.

Qui finance ? 

Pour couvrir l’indemnisation versée aux retraités avant 2002, aux enfants, quel que soit le régime de leurs parents, et le complément des non-salariés agricoles (affiliés auprès de la MSA, des CGSS et du régime d’Alsace-Moselle), une part du produit de la taxe sur les produits phytopharmaceutiques est affectée au fonds. Cette taxe s’ajoute ainsi à la contribution de chacune des branches accidents du travail – maladies professionnelles du régime général de la Sécurité sociale, du régime d’assurance obligatoire des non-salariés agricoles (Atexa) et du régime d’Alsace-Moselle – destinée à couvrir les dépenses du fonds engagés au titre des assurés relevant de chacun de ces régimes (hors complément pour les non-salariés agricoles).

La branche accidents du travail des salariés agricoles compensera si le fonds est déficitaire.

Toutes les informations sur les conditions ou les démarches à effectuer sont accessibles sur un site internet spécifique : fonds-indemnisation-pesticides.fr

Une foire aux questions thématique est mise à jour régulièrement et accessible à l’adresse : fonds-indemnisation-pesticides.fr/questions-reponses

On y aborde les thèmes de l’indemnisation, les délais, la reconnaissance de maladie professionnelle, les démarches et informations.

Une plateforme téléphonique dédiée au fonds d’indemnisation a aussi été mise en place par les équipes de la MSA Mayenne-Orne-Sarthe pour renseigner les personnes concernées sur les démarches ou le suivi d’un dossier :

0 800 084 326 (numéro vert, appel gratuit) du lundi au vendredi de 8h30 à 12h et de 13h30 à 16h30.