Vogüé. L’un des plus beaux villages de France, niché contre la falaise de calcaire surplombant l’Ardèche, son château du XVIIe siècle, ses rues médiévales..
.. et son village vacances quatre étoiles, ouvert toute l’année.
Le domaine de Lou Capitelle, affilié à l’AVMA, s’étend sur sept hectares et dispose d’un espace bien-être & spa de 400m2. Quoi de mieux pour s’éloigner du quotidien ?
Mais seules les feuilles mortes se pressent autour de la piscine, en ce matin brumeux de décembre… C’est un peu plus bas, bien au chaud, que les professionnels du tourisme solidaire se sont réunis.
« Sortir d’une lecture économique »
Tisser du lien, souffler… Les vacances offrent un cadre idéal pour tenter de répondre à des problématiques familiales compliquées ou sortir de l’isolement. Encore faut-il pouvoir y arriver : 40 % des Français ne partent toujours pas en été, dont les deux tiers pour des raisons financières. Certaines familles ne sont même jamais parties, ce qui peut entraîner une « déshabitude » des vacances, en ne s’autorisant pas à en rêver. Un défi que tentent de relever tous les jours les organismes de tourisme social à travers leurs diverses actions.
Au micro, Claude Bertoux, directeur adjoint de la CAF de la Loire, fait le bilan du dispositif Vacaf, qui a permis à 450 000 adultes et enfants de partir en 2015. L’organisme a engagé une politique de contrôles systématiques dans les 3 700 structures partenaires, afin de vérifier que leurs publics bénéficient du même séjour et des mêmes prestations que les autres vacanciers. « Nous réfléchissons à un autre modèle, explique le directeur adjoint. Le problème du budget reste important, malgré notre prise en charge à 50 %. Nos axes de travail portent sur le quotient familial, qui peut être discriminant, et sur la façon de favoriser les familles qui n’en ont jamais bénéficié. Il faut sortir de cette lecture uniquement économique et penser à toutes les situations qui fragilisent. »
Du côté de la Caisse d’assurance retraite et de la santé au travail (Carsat), on cherche comment combiner le bien-vieillir et les vacances pour seniors.
Nadia Basset (ici à gauche), responsable adjointe de l’action sociale à la Carsat Rhône-Alpes, détaille les partenariats mis en place avec la Cnav et l’ANCV (agence nationale pour les chèques-vacances), et son programme « Seniors en vacances ». Une offre de prévention qui touche une majorité de femmes, d’une moyenne d’âge de 81 ans, et dont beaucoup sont en veuvage. Là encore, une optimisation du repérage du public, ici les retraités fragiles, est nécessaire. Pour mettre en animation les conseils du bien-vieillir pendant ce temps de repos, les organismes recherchent un accueil optimal et riche.
La MSA Ardèche Drôme Loire a participé, quant à elle, à l’expérience « Partir pour rebondir », pour tout public, en partenariat avec l’ANCV. « Notre but est d’insérer le projet dans une dynamique personnelle et professionnelle, grâce au repérage des travailleurs sociaux de la MSA, explique Marie-Noëlle Laville, responsable de l’action sociale. Les freins au départ peuvent être financiers mais aussi psychosociaux : dans le monde agricole, l’idée que l’on doit travailler tout le temps est forte. Je me souviens de ce père éleveur et son fils de 8 ans qui n’avaient jamais pris de petit-déjeuner ensemble avant ces quelques jours de vacances. Ça ne parait rien comme ça, mais c’est fondamental pour tisser du lien. »
Partage d’expériences
L’organisatrice du carrefour n’est pas en reste : l’AVMA fourmille de projets et de réflexions, dans une politique sociale en mutation permanente. Dernier en date : « Part’âge », des vacances intergénérationnelles entre des résidents du réseau Marpa et des jeunes en formation d’aide à la personne au sein des MFR. Lancés en juin 2016, une quinzaine de séjours sont en construction.
Dans le thème du handicap, le bilan est positif pour le projet « Des vacances pour les aidants », lancé en 2015 au domaine de Pyrène, à Cauterets, dans les Hautes-Pyrénées, et étendu aux villages de la Châtaigneraie, dans le Cantal, et Lou Capitelle en 2016. « L’idée, avec l’aide des directeurs de villages, a été de proposer aux aidants l’aide d’un animateur pour accompagner le proche handicapé et permettre ainsi à sa famille de profiter pleinement de son séjour dans une structure adaptée et à un prix réduit », relate Jean-Pierre Renault, président du comité directeur AVMA et directeur de la MSA Haute-Normandie.
C’est d’ailleurs en Normandie, ainsi qu’en Bretagne, que l’association tente, parallèlement, de redonner un coup de fouet aux colonies de vacances. « Il y a une forte érosion du nombre d’enfants qui partent, affirme Jean-Pierre Renault. Les causes sont diverses : le coût, la confiance dans les encadrants, les formats… Mais la colonie est un moment important pour le vivre ensemble, et nous souhaitons les développer. » Sylvain Crapez, délégué général de l’Union nationale des associations de tourisme de plein air (Unat), en atteste : « On est passé sous la barre du million d’enfants partis en 2016. L’observatoire des vacances et des loisirs des enfants et des jeunes montre pourtant l’importance du premier départ, et 80 % des jeunes qui sont partis ont envie de renouveler l’expérience. La colonie est un temps important pour la socialisation et le développement de l’enfant. »
C’est pourquoi l’AVMA a lancé l’été 2016 un nouveau modèle, « My Colo’ », pour redynamiser le secteur. Les villages vacances de Cabourg dans le Calvados et de Beg Porz dans le Finistère accueillent, dans le cadre d’un programme pédagogique et dans des locaux réadaptés, des groupes de jeunes, pour une durée de quinze jours. Ils proposent de nouvelles activités, comme le surf ou la plongée. Plusieurs axes de travail ont été définis : le développement des réseaux sociaux, l’identification de l’offre sur les territoires, ainsi qu’une réflexion sur le mécénat, voire l’organisation de visites destinées aux parents.
Ainsi, l’AVMA se positionne, comme le dit Jérôme Durand, responsable de la communication, « comme un défricheur de projets : tester, expérimenter et communiquer, pour espérer que ses actions soient reprises dans les caisses et maintenus dans le temps. » D’où l’importance de se réunir : « Pour essaimer, il faut les faire connaître », conclut Jean-Pierre Renault.
Avec ses 4,08 millions de vacanciers par an et un chiffre d’affaires de 1,4 milliard d’euros, le tourisme solidaire et social français est un acteur de poids. Surtout, lorsqu’on sait que les deux tiers des recettes touristiques de l’Hexagone sont générées par des Français. L’ancrage local reste donc primordial, à l’image de Lou Capitelle qui, grâce à son nouvel espace bien-être, attire aujourd’hui les habitants de Vogüé et des environs toute l’année.
Ce thème semble d’ailleurs être le mot d’ordre, à la sortie de cette journée.
Un bien-être solidaire, pour faire tomber les murs, relier les hommes, et aller plus loin dans un tourisme humaniste, innovant et accueillant.
Photos : Marie Molinario/le Bimsa.
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