Pourquoi un projet scientifique à la MSA ?

Bernard Salles : Il est important de montrer que la MSA mène des activités de recherche sur des questions qui la préoccupent et essaie d’y répondre afin d’améliorer l’efficacité du système en termes de qualité de vie de ses affiliés. Les travaux ne portent pas que sur le médical ou le biomédical, ils sont beaucoup plus larges. Nous dépassons en fait le domaine des pathologies.

Jean-Marc Soulat : Si nous devions en définir le cadre, ce ne serait pas la recherche en santé mais plutôt en protection sociale agricole et rurale avec effectivement une grande transversalité des disciplines impliquées, que ce soit la santé, l’économie, les sciences humaines ou sociales. Les résultats des projets font l’objet de publications ou de communications scientifiques et grand public. Ils peuvent entraîner un changement dans la façon dont la MSA va prendre en charge le problème traité. Sur les actions déjà mises en place, la MSA peut modifier ses méthodes visant à prévenir ces risques. Nous sommes principalement dans une logique de prévention. Nous nous intéressons aussi au parcours de soins, en particulier lorsqu’il est coordonné.

Comment et quand est né ce projet ?

J.-M.S.: Lorsque je suis arrivé à la MSA en 2017, je me suis aperçu que les caisses travaillaient beaucoup avec des équipes de chercheurs locaux. Des travaux de même nature pouvaient être menés dans des caisses différentes sans qu’elles ne le sachent.
La première idée a été de recenser l’ensemble de ces travaux. À cette fin, nous avons recruté à partir de 2019 une chargée de mission, docteure en anthropologie, Delphine Burguet. Son travail a conduit au développement d’un conseil scientifique permettant d’évaluer la qualité de la recherche, la réorienter et donner un avis.

Dès le départ, j’ai souhaité qu’il soit constitué de trois corps : des chercheurs, comme Bernard Salles ; des collaborateurs MSA qui ont une appétence et une compétence dans la recherche ; des élus, car j’ai constaté leur intérêt pour les travaux de recherche et leurs résultats. Le développement suivant a été de mettre en place, avec Bernard notamment et grâce à la direction déléguée aux politiques sociales de la caisse centrale de la MSA, un financement sous forme d’appel à projets permettant de définir des axes de recherche intéressant la MSA.

Le conseil scientifique est donc l’organe qui détermine les axes du projet scientifique ?

B. S. : Au départ, nous partions sur un seul conseil. Nous en avons désormais deux. Delphine Burguet anime un réseau de correspondants, un par caisse, qui  permet de faire remonter les initiatives en termes de recherche. Nous voulons que les axes émanent de chaque caisse et des questions que se posent les agents. Le rôle du conseil scientifique (CS) est d’évaluer ces demandes et de dégager progressivement les axes de recherche investis en MSA. Il les soumet ensuite au second organe, le comité d’orientation scientifique (COS), composé d’élus MSA, de représentants des différentes directions de la CCMSA et du président du conseil scientifique. Le COS valide entre 3 et 4 axes de recherche. 

J.-M. S. : Le COS est construit comme les comités de la MSA, conseil d’administration ou comité de protection sociale, c’est-à-dire qu’il est à la main des élus qui le pilotent à parité salariés-non-salariés. C’est une instance institutionnelle de la CCMSA à vocation politique et stratégique. Afin de faire le lien et de coordonner l’action des deux entités, nous avons créé une cellule recherche composée d’Aïcha Salomé, attachée de direction et coordinatrice, de Pauline Pech, assistante, de Delphine Burguet, de Bernard et de moi-même.

Revenons à l’appel à projets : quel est le processus de sélection et d’évaluation ?

B. S. : Le conseil scientifique travaille en deux phases : la première est celle des lettres d’intention. Nous pouvons subventionner entre 5 et 7 projets par an et nous prenons le double de lettres. La sélection se fait au consensus. La seconde phase consiste à évaluer les projets. Nous les classons soit en A (indication pour : il faut les financer), en B (le classement peut être changé selon la décision du comité d’orientation) ou en C (ceux qui ne sont pas financés en raison de problèmes de faisabilité voire de qualité). Le choix final revient au COS.
L’année dernière, 6 projets ont été retenus. Nous avons mis en place des comités techniques dont Delphine est responsable. Ces petits comités de suivi s’assurent que tout se passe bien. Des réunions sont prévues à mi-parcours et à la fin. Il faut savoir qu’en recherche, les résultats ne sont pas obtenus au bout des deux ans pile. Ensuite, il y a des écritures d’articles. Il faut compter à peu près deux ans et demi, trois ans selon la productivité. Mais il est important d’évaluer notre impact. La MSA utilise des ressources pour financer la recherche. Les comités techniques permettent de déterminer si c’est utile ou pas.

J.-M. S. : De plus, ces derniers permettent au chercheur d’avoir des interlocuteurs MSA qui peuvent l’aider à trouver ce qu’il cherche, directement ou indirectement. À travers ces échanges entre le chercheur et les collaborateurs des caisses se crée un dialogue.

Quels sont les développements possibles du projet scientifique ?

B. S. : Nous avons dans l’idée d’organiser des journées scientifiques. Le conseil scientifique peut répondre à des questions que se pose la MSA. Des questions de toxicologie, de bien-être au travail, d’organisation au sein de l’institution, tout cela est ouvert à la condition que ce soit une question de recherche. 

J.-M. S.  : Lors des journées nationales de la MSA de novembre 2021, dont l’un des sujets concernait la transition agroécologique, nous avons présenté un projet sur ce thème. Ensuite, les comités de protection sociale de la CCMSA ont souhaité présenter le projet scientifique lors de leur journée commune annuelle.
Nous sentons de plus en plus une appropriation de la part des élus et des caisses. Les journées scientifiques serviront à présenter les résultats des projets financés du premier appel qui arrive à échéance fin 2022. Nous avons prévu d’organiser ces journées en 2023 parce que nous pensons que nous aurons assez de résultats. L’idée est de mettre en valeur toute cette activité sachant que si nous continuons comme ça, nous aurons forcément une production régulière chaque année.