En se promenant dans les rues du centre-bourg de Rochefort-Montagne, on aperçoit à l’horizon le versant nord des Monts Dore, on passe devant les maisons en basalte du centre-bourg, et là, vers 17 heures, on croise des groupes d’étudiants. D’où sortent-ils ? Du lycée agricole de la commune qui en accueille plus d’une centaine. De quoi garnir les rangs – et faire considérablement baisser la moyenne d’âge – d’une population de moins de 900 habitants.

Un café comme espace d’échanges

En cette veille de week-end du mois de février, à l’heure de l’apéritif, on pousse les portes du Frêne qui accélère. Dans un local dans son jus, quelques tables et une banquette défraîchie accueillent Clément, Ninon, Corentin, Pierre et Alexis. Ils ont entre 18 et 22 ans, ils viennent du Tarn, du Loiret ou encore de Picardie. Ici, les patrons, ce sont eux. Ce café associatif est un projet né en 2024 sous l’impulsion de ces élèves de BTS Gestion et protection de la nature. Depuis la rentrée de septembre, il ouvre une à deux fois par semaine dans un local mis en location à prix symbolique par un habitant de la commune. L’objectif : développer un espace d’échanges entre les étudiants et les autres habitants.

Jeunes ruraux et fiers de l’être, amateurs de randonnée ou de photographie, ils n’envisagent pas de quitter la campagne pour s’installer en ville. Mais ils sont lucides. « Quand je suis arrivée ici, une semaine avant la rentrée, je n’ai quasiment croisé personne pendant des jours », confie Ninon. Alors comment faire pour rencontrer des gens en dehors du lycée ? « Aller à la messe ! », plaisante Pierre. Même pas : la grande église surplombant Rochefort reste la plupart du temps fermée. Il y a bien Clermont-Ferrand et ses soirées étudiantes du jeudi soir où Alexis se rend de temps en temps, à moins d’une heure de route. Mais il faut gérer le retour ou dormir sur place. Et les applications de rencontre ? « Dès qu’on sort de Clermont il n’y a plus personne », affirme-t-il. Alors voilà pourquoi ce café existe : « On voulait créer un lieu sympa où tout le monde est le bienvenu », explique Clément.

Jeunes Café Frêne qui accélère Auvergne
Dans la salle du café Le Frêne qui accélère, devenu le QG des étudiants.

Soutien scolaire, initiation botanique…

La porte vitrée de l’établissement s’ouvre. Un nouveau client, la soixantaine, un habitant du village qui vient boire une bière. Il raconte qu’il y a plus de trente ans, on trouvait « une dizaine de cafés et de restaurants à Rochefort ». Exode rural, baisse du nombre d’agriculteurs, ralentissement économique, perte d’habitudes anciennes… Les raisons de cette disparition sont nombreuses.

Mais les étudiants ne baissent pas les bras. Au Frêne qui accélère, ils tentent d’attirer le chaland avec des activités : jeux de société, soutien scolaire, initiation à la botanique… Assis sur la banquette surplombée par une exposition de photos de nature, la bande d’amis se souvient du point d’orgue de fréquentation du café : le jour du marché de Noël de la commune, où plus d’une cinquantaine de clients sont venus consommer leurs crêpes.

Récompensée par l’Appel à projet jeunes 2025 organisé par la MSA, la jeune équipe va pouvoir lancer de nouveaux projets. Et elle n’en manque pas : vente directe du fromage fabriqué au lycée agricole, achat de nouveaux meubles pour la salle, soirées jeu de rôles…

Etudiants agricoles Rochefort Montagne
Les étudiants se préparent à aménager un jardin partagé dans la commune. Objectif : créer un espace d’échange entre les habitants du village.

Leur prochain gros chantier, c’est la création d’un jardin sur un terrain en friche mis à disposition par le propriétaire du local du café. Dès le lendemain matin à 8 heures, ils seront sur le pied de guerre pour aller récupérer des plants d’arbres dans une pépinière située à cinquante kilomètres de là. Ensuite, un gros travail est prévu : préparation du sol, plantation de haies, création de marches pour accéder à la parcelle…

Mais en attendant de se retrousser les manches, ça discute encore autour de la table où de nouvelles têtes ont fait leur apparition. Ce sont d’anciens élèves en visite dans la région, venus voir leurs amis. Leur premier arrêt, c’est au « Frêne ». L’air de rien, le café est devenu le lieu de rendez-vous des BTS, leur QG. Un peu comme dans n’importe quelle ville étudiante.