Aux Hardys-Béhélec, association membre du réseau Solidel pour les travailleurs handicapés du secteur agricole et des territoires ruraux, l’édition 2020 du DuoDay est un tiercé gagnant.

Marc, Joachim et Gilles ne cachent pas leur enthousiasme à l’issue de cette journée passée en entreprise. Et pour les personnes qui les ont accueillis, l’expérience semble avoir été tout aussi enrichissante. Les propos de  monsieur Ryo, responsable du service maintenance du conseil départemental du Morbihan, que rapporte Armelle Leborgne, chargée d’insertion à l’Esat, en prouve s’il le fallait tout le bien-fondé : « C’est la première fois que je faisais ça et je ne connaissais pas bien le handicap psychique. J’ai passé toute la journée avec Gilles et ça été riche. Je l’ai  découvert au fil des heures, c’est une expérience vraiment intéressante. Je resigne pour l’année prochaine ! » 

Gilles, 52 ans

Après avoir travaillé pendant vingt ans en milieu ordinaire comme peintre en bâtiment, les méandres de la vie ont amené Gilles aux espaces verts des Hardys-Béhélec.

Son DuoDay s’est déroulé au service maintenance du conseil départemental. En une journée, il est passé d’un chantier de carrelage à la menuiserie, de la visite de la ferme à l’entretien des chaudières d’un collège, de la plomberie à l’électricité. Un sacré tour d’horizon pour cet homme qui aurait été intéressé de travailler dans le secteur : « L’électricité, la plomberie, la menuiserie, faut s’y connaître. Avec un peu de théorie et de pratique, peut-être que j’aurais pu y arriver mais vu mon âge… Et puis ce n’est pas évident pour moi, je ne serais pas assez compétent, je pense. »

Le responsable, qui l’a accompagné sur tous les chantiers, a su, lui, déceler ses compétences, notamment en peinture. Simplement, en termes de risques et de rythme, Gilles ne peut plus être sur ces postes-là. « J’ai un traitement. Des fois, j’ai des hauts et des bas. Il me faut quelque chose qui me soit approprié, avec un encadrant qui pourrait m’aider sur la maintenance. » 

Gilles (à gauche) a découvert de nombreux métiers liés à la maintenance au cours de son Duoday passé en compagnie de monsieur Ryo.

Si le DuoDay lui a permis de s’en rendre compte, ce ne sont ni l’amertume ni la fatalité qui l’emportent. Non seulement il a trouvé l’expérience et les échanges au cours de cette journée enrichissants mais grâce aux conseils de monsieur Ryo, l’idée de travailler dans ce domaine n’est désormais pas complètement exclue. « On envisage peut-être un stage en collectivité où il ferait un peu de peinture et d’entretien, explique Armelle Leborgne, il lui faut juste moins de polyvalence, un rythme moins soutenu et un encadrement. »

Marc, 37 ans

Ce sont des perspectives différentes qui ont déterminé le choix de Marc. Lui aussi travaille aux espaces verts de l’Esat. Son duo, il a souhaité l’effectuer aux Ateliers de l’Oust, à deux pas des Hardys, dans le même secteur d’activité. Malgré tout, la découverte d’un nouveau cadre et de tâches différentes était l’une de ses motivations premières : « Même si c’est toujours en espaces verts, ça permet d’avoir un autre environnement, de voir d’autres gens, de découvrir de nouveaux chantiers. »

Mais surtout, c’est l’occasion pour lui de sortir du milieu protégé de l’Esat, où il travaille depuis 2011 suite à un accident de la route en 2003, et retrouver un rythme proche de celui d’une entreprise privée. Les Ateliers de l’Oust sont comme un palier entre ces deux mondes : c’est une entreprise adaptée où le travail est considéré comme en milieu ordinaire mais réservé aux personnes ayant une reconnaissance de handicap. « Les chantiers sont différents, on va un peu plus loin, on mange sur place et le rythme est plus élevé », explique Marc à l’issue de sa journée, avant d’ajouter un sourire dans la voix : « La paye n’est pas la même, je crois… »

Car ce qu’il faut savoir, et ce qui a motivé aussi son choix, c’est que Marc y a décroché un stage de minimum quinze jours en janvier 2021. Cette journée était ainsi l’occasion pour lui de voir comment ça se passait, de se mettre en confiance et de découvrir l’environnement dans lequel il va évoluer en début d’année. Il a déblayé le terrain, en somme : « J’ai fait des lignes de gaz (désherbage le long des tuyaux de gaz), ça libère le passage et évite les accidents. Ils ne m’ont pas du tout mis la pression, ça s’est super bien passé ! » Il ne reste qu’à lui souhaiter que son stage se déroule de la même façon et, pourquoi pas, aboutisse sur une embauche…

Joachim, 32 ans 

Un espoir est à deux doigts de se matérialiser pour Joachim. Aux Hardys, il travaille à l’élevage de poulets et dans une lapinière. « J’aime bien tout ce qui a trait à l’agriculture, les bêtes », confie-t-il au début de l’entretien. Il a choisi l’agroalimentaire et l’entreprise Celvia. « Joachim a déjà pu appréhender ce secteur, dans la mesure où il est mis à disposition dans une lapinière. Il a ainsi conscience que les conditions peuvent être plus stressantes que celles de son travail actuel. Pour autant, il a vivement souhaité passer une journée dans une entreprise comme Celvia. Il aspire à mieux connaître ces métiers et éventuellement y poursuivre sa carrière », indique Armelle Leborgne. Ce que semble démontrer le ressenti de Joachim : « j’ai tourné sur tous les postes. J’aime bien les deux, ici (à l’Esat) et là-bas (chez Celvia). J’aimerais bien tenter une journée de temps en temps en mise à disposition. »

Et ce DuoDay a suffi pour qu’un nouvel avenir professionnel se dessine. Lorsque l’employeur découvre les compétences du jeune homme de 32 ans, il contacte la chargée d’insertion pour proposer une embauche quasi immédiate, ou de l’intérim. Une aubaine d’autant plus que « le rythme convient à peu près à Joachim, explique la chargée d’insertion. Ça ne lui fait pas peur. L’agroalimentaire c’est quelque chose qu’il appréhende positivement ».

Ne reste qu’à signer le contrat donc ? Ce n’est pas aussi simple que cela malheureusement : « Nous avons discuté avec Joachim. Ce que l’on souhaite c’est qu’au niveau santé, il puisse maintenir son équilibre. Et le médecin a dit qu’il ne fallait pas changer son rythme de travail par rapport au traitement qu’il prend tous les jours à heure fixe. Nous avons communiqué ces informations à l’employeur en précisant que Joachim ne pouvait pas travailler en deux huit comme il le souhaitait. Nous sommes en pourparlers. » Le problème est que l’entreprise considère qu’il faut que tout le monde soit sur un pied d’égalité. Elle est d’accord pour intégrer des personnes en situation de handicap mais dans les mêmes conditions que les autres. « Nous avons expliqué qu’il faut une prise en compte de la situation de Joachim. D’autant que les entreprises ont des avantages financiers quand elles embauchent des travailleurs handicapés. C’est un dialogue qu’il faut instaurer pour que les deux mondes apprennent à se connaître, à se comprendre et à coopérer. C’est un processus qui peut prendre du temps et il faudra peut-être plusieurs DuoDays pour que chacun comprenne la complexité des choses », conclut Armelle Leborgne.

Aux dernières nouvelles, un seul semble suffisant dans ce cas ; les pourparlers pourraient aboutir à un contrat de mise à disposition en début d’année et Joachim entamerait ainsi son nouveau parcours professionnel.

La MSA, entreprise handi-accueillante

Le DuoDay, lancé en 2018 en France, permet la création de duos entre des personnes en situation de handicap et des professionnels volontaires. Une façon concrète d’appréhender la question de l’inclusion.

Prévu en mai, annulé, il a finalement été reporté cette année pour la Semaine européenne pour l’emploi des personnes handicapées (SEEPH). Une occasion de montrer tout l’engagement de la MSA qui, dès 2009, mène une politique engagée sur ce sujet. Elle se traduit concrètement par des accords avec les partenaires sociaux, des commissions handicap pluridisciplinaires, un référent par caisse et de nombreuses actions de sensibilisation. Objectifs : encourager le recrutement, accompagner les salariés (ainsi que les managers) de manière personnalisée, prévenir la désinsertion professionnelle et favoriser le maintien en emploi. Et innover. 

Au 31 décembre 2019, le taux d’emploi de personnes en reconnaissance de handicap à la MSA est de 8,96 %, dont 97 % sont titulaires d’un CDI et 46 % ont plus de 20 ans d’ancienneté.

Cela passe également par l’accompagnement d’Esat via notamment son association Solidel, crée en 1992, et son réseau de 150 établissements. Depuis 2019, la MSA permet également à ses adhérents sourds ou malentendants d’échanger par téléphone ou en agence grâce à l’application Acceo, téléchargeable gratuitement sur téléphone, tablette et ordinateur. En un an, plus de 1 100 contacts ont ainsi pu avoir lieu, par téléphone dans leur grande majorité (93 %). Les appels peuvent faire l’objet d’une traduction en langue des signes française, d’une transcription instantanée de la parole ou d’une traduction en langue parlée complétée.